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Haïti : les personnes déplacées confrontées à des risques accrus dans les sites improvisés

Près de la moitié des personnes déplacées internes de la capitale haïtienne, Port-au-Prince, ont dû quitter leurs logements temporaires dans les communautés d’accueil et résident désormais dans des conditions vulnérables sur des sites improvisés, doublant presque le chiffre de la fin 2022, a indiqué mercredi une agence onusienne, relevant que les dernières données montrent « une tendance à la fatigue croissante dans les communautés d’accueil et les familles ».

Cette constatation, parmi d’autres tirées de la dernière matrice de suivi des déplacements (DTM) de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), met en évidence les dangers croissants pour les déplacés à Haïti. Le rapport met en exergue « une détérioration inquiétante du tissu social » d’un pays frappé par la violence des gangs et les catastrophes. 

« Fournir une aide aux familles d’accueil et contribuer à leur résilience accrue est crucial car elles sont les premières à répondre à la crise », a déclaré dans un communiqué Philippe Branchat, Chef de mission de l’OIM en Haïti.  

Les données précédentes de l’OIM montrent que la majorité des personnes déplacées ont cherché la sécurité auprès d’amis et de familles dans d’autres communautés. Lorsqu’elles accueillent des personnes déplacées, les communautés doivent partager leurs ressources limitées avec elles. « Au fur et à mesure que la crise s’éternise, leurs capacités s’érodent », a détaillé l’OIM.

Un Plan de réponse humanitaire sous-financé

Un enfant mange des aliments thérapeutiques prêts à l'emploi dans un centre de santé et de nutrition à Port-au-Prince, en Haïti.
© UNICEF/Georges Harry Rouzier
Un enfant mange des aliments thérapeutiques prêts à l'emploi dans un centre de santé et de nutrition à Port-au-Prince, en Haïti.

De plus, les niveaux élevés d’insécurité créent un climat de méfiance entre certaines communautés d’accueil et les populations déplacées, détériorant ainsi la cohésion sociale. Cette situation pousse les personnes déplacées à quitter la sécurité relative de leurs maisons pour des sites de déplacement improvisés où elles sont exposées à des risques supplémentaires, y compris la violence communautaire, la violence sexuelle et sexiste, la discrimination et l’abus pur et simple.  

Les conditions dans les sites improvisés sont extrêmement difficiles. Plus de la moitié d’entre eux n’ont pas de latrines, et lorsqu’elles existent, elles sont loin de répondre aux normes d’hygiène de base - une situation particulièrement préoccupante compte tenu des « épidémies récurrentes de choléra » en Haïti.

« Pourtant, avec près de la moitié de la population du pays, soit près de 5,2 millions de personnes, dans un besoin désespéré et seulement 25% du Plan de réponse humanitaire d’Haïti financé, l’OIM lance un appel fervent à une augmentation de l’aide internationale pour des solutions à la fois immédiates et à long terme », a ajouté M. Branchat. 

Sur le terrain, l’OIM et ses partenaires fournissent des abris, des articles d’hygiène personnelle, des lampes solaires, des ustensiles de cuisine et d’autres articles essentiels, et mènent des interventions en matière d’eau, d’assainissement et d’hygiène sur les sites. En outre, l’agence onusienne aide le gouvernement haïtien à restaurer les services publics de base, afin de rétablir la confiance entre les citoyens et les institutions de l’Etat.

La violence généralisée, principal facteur de déplacement

Par ailleurs, le document note que la violence généralisée est le principal facteur de déplacement pour les quelque 200.000 personnes déplacées à l’intérieur du pays en Haïti. Bien que la plus grande concentration de personnes déplacées vive dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, d’autres régions commencent à subir des pressions. 

« Les tensions et les craintes sont encore accrues par le [Bwa Kalé], un mouvement d’autodéfense connu pour ses lynchages aveugles, qui sapent la solidarité communautaire », a fait valoir l’OIM. 

En outre, plus de 100.000 Haïtiens ont été renvoyés de force des pays voisins jusqu’à présent en 2023, et beaucoup d’entre eux n’ont pas de papiers d’identité, ce qui complique leur réintégration, a ajouté l’agence onusienne. Notamment, parmi les migrants rapatriés interrogés, 22% avaient déjà été déplacés à l’intérieur d’Haïti. 

Pour l’agence onusienne, cela souligne la nécessité de trouver des solutions durables et à long terme aux déplacements internes. « Alors que l’aide immédiate pour sauver des vies est essentielle pour les personnes déplacées à l’intérieur du pays et les communautés d’accueil, il est de plus en plus urgent d’accélérer les progrès pour s’attaquer aux causes profondes des déplacements », a fait remarquer l’OIM.