Fil d'Ariane
Onze enfants périssent chaque semaine sur la route maritime migratoire de la Méditerranée centrale
Près de 11 enfants périssent ou disparaissent chaque semaine en tentant de traverser la périlleuse route maritime migratoire de la Méditerranée centrale, qui relie l’Afrique du Nord à l’Europe, selon le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF).
En d’autres termes, au moins 289 enfants auraient perdu la vie ou disparu cette année en tentant de trouver la sécurité, la paix et des possibilités d’avenir. Depuis 2018, près de 1.500 enfants ont péri ou ont été portés disparus pendant qu’ils tentaient d'emprunter la route maritime migratoire de la Méditerranée centrale, d’après les estimations de l'UNICEF.
« Bien trop d’enfants périssent ou disparaissent en embarquant sur des bateaux sur les côtes de la Méditerranée dans l’espoir de se mettre en sécurité, de retrouver leur famille et de s’assurer un avenir meilleur », a affirmé dans un communiqué Catherine Russell, Directrice générale de l’UNICEF. « Cela montre clairement que nous devons redoubler d’efforts pour permettre aux enfants d’obtenir l’asile de manière sûre et légale, tout en renforçant les efforts de secours en mer ».
Une traversée périlleuse
Jusqu’à présent, quelque 11.600 enfants auraient effectué cette dangereuse traversée. La majorité d’entre eux étaient seuls ou séparés de leurs parents.
Au cours du premier trimestre 2023, 3.300 enfants – soit 71% de la totalité des enfants arrivés en Europe par cette route – ont été déclarés non accompagnés ou séparés de leurs parents, ou de leurs représentants légaux, ce qui les expose à un risque accru de violence, d’exploitation et d’abus. Les filles qui voyagent seules sont particulièrement susceptibles d’être victimes de violences avant, pendant et après leur périple.
« Le nombre d’enfants qui ont perdu la vie en tentant de traverser la mer Méditerranée pour rejoindre l’Europe a doublé au cours du premier semestre de cette année par rapport à la même période l’année dernière. Poussés par les conflits et le changement climatique, de plus en plus d’enfants mettent leur vie en danger en effectuant la dangereuse traversée de la mer Méditerranée pour rejoindre l’Europe », a déclaré lors d’un point de presse régulier de l’ONU à Genève, Verena Knaus, Responsable de l’UNICEF pour les migrations et les déplacements.
Par ailleurs, l’Agence de l’ONU pour les migrations (OIM) note qu’une personne sur cinq parmi les 8.274 personnes décédées ou disparues sur la route était un enfant.
Nombreux naufrages
Or le nombre de décès d’enfants est quasiment impossible à vérifier, et probablement bien plus élevé, sachant que de nombreux naufrages sur la route migratoire de la Méditerranée centrale ne laissent aucun survivant et passent inaperçus.
Au cours des derniers mois, des enfants et des bébés n’ont cessé de périr sur cette route, ainsi que sur d’autres routes migratoires de la Méditerranée et sur la route de l’Atlantique qui part de l’Afrique de l’Ouest, notamment au large de la Grèce et des Canaries en Espagne, où de tragiques naufrages ont encore eu lieu récemment.
Sur un autre plan, l’Agence de l’ONU pour les réfugiés (HCR) a consigné plus de 90.000 arrivées par la mer Méditerranée en Europe entre le mois de janvier 2023 et le 9 juillet 2023. La plupart de ces arrivées (77%) ont eu lieu par la route migratoire de la Méditerranée centrale. Cette route (qui fait référence à la route maritime qui relie l’Afrique du Nord, principalement la Tunisie et la Libye, à l’Italie) fait partie des routes les plus utilisées et les plus dangereuses.
Selon le HCR, les enfants représentent 16% des 69.600 réfugiés et migrants qui ont emprunté la route migratoire de la Méditerranée centrale depuis janvier 2023, ce qui représente près de 11.600 enfants. Il s’agit d’une moyenne de 428 enfants par semaine.
Silence de la communauté internationale
Ce chiffre a doublé par rapport à la même période en 2022, et ce, en dépit des terribles dangers encourus. La plupart sont originaires d’Afrique ou du Moyen-Orient et ont déjà effectué un périlleux périple avant d’embarquer en Libye ou en Tunisie.
Face aux dangers encourus par les enfants, l’UNICEF demande aux pays d’origine et de transit à s’attaquer aux conflits et aux risques climatiques, en élargissant la couverture de protection sociale et en leur donnant davantage d’occasions d’apprendre et de gagner leur vie. L’agence appelle également l’Union européenne à prendre en compte ces points dans son Pacte sur la migration et l’asile, en cours de négociation.
Pour l’UNICEF, la communauté internationale ne peut pas continuer à ignorer ce qui se passe, « à rester silencieuse alors que près de 300 enfants - un avion entier rempli d’enfants - meurent dans les eaux entre l’Europe et l’Afrique en l’espace de six mois seulement ». Et pourtant, au vu de ces chiffres et du silence qui entoure tant de ces morts évitables, il semble bien que le monde ignore délibérément ce qui se passe, regrette la responsable de l’UNICEF.
« Des centaines de filles et de garçons se noient dans l’inaction du monde », a conclu Mme Knaus.