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L’ONU lance un cri d’alerte pour la protection des Haïtiens menacés d'expulsion

Les hommes, femmes et enfants haïtiens vulnérables qui sont déplacés sur le continent américain ne devraient pas être expulsés des pays où ils ont trouvé refuge, ont déclaré jeudi plusieurs agences des Nations Unies. Leur avertissement intervient alors que des milliers d'Haïtiens ont été expulsés d'un camp de fortune situé à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique.

« A la date d’hier, près de 5.500 personnes sont revenues depuis le 19 septembre et nous nous attendons à six à sept vols par jour, tous les jours, jusqu'à ce que nous ayons une indication différente de la part du gouvernement américain et du gouvernement haïtien », a déclaré le Chef de mission de l’Organisation internationale pour les migrations, Giuseppe Loprete, lors d’un entretien avec ONU Info.

« La situation est très grave en Haïti en ce moment. Il y a de multiples crises. Les zones contrôlées par les gangs dans le sud, trois départements touchés par le tremblement de terre, l'instabilité politique, la population n'est vaccinée qu'à environ 1 ou 2% contre la Covid-19. C'est la situation qu'elles trouvent en arrivant. C'est une situation difficile », a ajouté M. Loprete.

Un retour difficile

Selon le responsable de l'OIM, la plupart de ces personnes ont quitté Haïti il y a 5 ans ou plus et dans certains cas elles ont perdu les liens avec leur famille en Haïti et n’ont personne dans le pays.

« Parfois, c'est aussi difficile parce que les familles comptaient aussi sur leurs envois de fonds, donc elles ont perdu aussi ce soutien. Elles reviennent les mains vides », a-t-il dit.

Les Haïtiens de retour peuvent s'installer où ils le souhaitent, selon l’OIM. « À l''aéroport, ils reçoivent une aide en espèces, des kits d'hygiène, un soutien médical et psychologique, mais ils sont ensuite libres d'aller où ils veulent », a expliqué M.Loprete ajoutant que la plupart « choisissent de rester dans les environs de Port-au-Prince », la capitale. 

Une situation qui ne peut que se dégrader

Dans un communiqué conjoint, l'Agence pour les migrations (OIM), l'Agence pour les réfugiés (HCR), le Fonds pour l'enfance (UNICEF) et le Bureau des droits de l'homme de l’ONU (HCDH) notent que de nombreux Haïtiens au cours de la dernière décennie ont été confrontés à une série de catastrophes naturelles, à une insécurité alimentaire aiguë et à la violence des gangs.

La situation en Haïti « ne peut que s'aggraver » en raison du tremblement de terre du mois dernier, ce qui rend l'île impropre au retour des Haïtiens expulsés, ont affirmé les agences onusiennes.

Parmi les personnes qui ont quitté ce pays des Caraïbes figurent des enfants non accompagnés et séparés, des victimes de la traite des êtres humains et des survivants de violences sexistes.

Certaines peuvent avoir besoin d'une protection internationale en tant que réfugiés, tandis que d'autres peuvent avoir des besoins de protection différents, ont signalé les agences des Nations Unies, avant d'insister sur le fait que le droit international « interdit les expulsions collectives et exige que chaque cas soit examiné individuellement ».

En outre, les discours publics discriminatoires dénigrant les migrants risquent de contribuer au racisme et à la xénophobie, ont-elles ajouté.

Escalade des crises

Haïti continue de faire face à une escalade de la violence et de l'insécurité, avec au moins 19.000 personnes déplacées dans la capitale Port-au-Prince au cours du seul été 2021, ont déclaré les agences onusiennes.

Plus de 20 % des filles et des garçons ont été victimes de violences sexuelles. En outre, près de 24% de la population, dont 12,9% d'enfants, vivent sous le seuil d'extrême pauvreté de 1,23 dollar par jour.

Quelque 4,4 millions de personnes, soit près de 46% de la population, sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, dont 1,2 million de personnes qui se trouvent à un niveau d'urgence et 3,2 millions d'autres devant faire face à un niveau de crise.

On estime que 217.000 enfants souffrent de malnutrition aiguë modérée à sévère. Les agences ont averti que cette situation est appelée à s'aggraver en raison du tremblement de terre du 14 août et de ses conséquences.

La capacité d'accueil des Haïtiens a été mise à rude épreuve et les conditions en Haïti restent désastreuses, ce qui n'est pas propice aux retours forcés, ont souligné les agences.