Fil d'Ariane
Examen de l’Iran devant le CERD : la situation des minorités ethniques, religieuses et autres est au cœur du dialogue
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD, selon l’acronyme anglais) a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par la République islamique d’Iran au titre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Pendant cet examen, qui s’est déroulé en présence d’une délégation conduite par M. Ali Bahreini, Représentant permanent de la République islamique d’Iran auprès des Nations Unies à Genève, un expert du Comité a fait état d’informations selon lesquelles les minorités ethniques, religieuses et autres relevant de la juridiction de l'Iran, en particulier les Kurdes sunnites et les Baloutches, seraient victimes d'une discrimination qui, selon plusieurs sources, se manifesterait de façon structurelle et systémique. Les régions habitées par des populations ethnolinguistiques souffriraient de privations économiques et de sous-investissement, une « suppression culturelle » étant aussi signalée, avec l'érosion des langues et des traditions locales, a ajouté l’expert. Il a également fait état d’informations selon lesquelles des membres de minorités ethnolinguistiques et ethnoreligieuses ont été soumis à la torture et à d'autres formes de mauvais traitements, ainsi qu'à des détentions arbitraires.
Le Comité, a également indiqué cet expert, est informé que les minorités ethniques, religieuses et autres, en particulier les Kurdes et les Baloutches, ainsi que les Turcs azerbaïdjanais et les Arabes ahwazis, ont été touchés de manière disproportionnée par la réponse du Gouvernement aux manifestations de septembre 2022 après la mort de Mahsa Amini.
Le Comité, a ajouté ce même expert, est aussi préoccupé par l'utilisation d'un langage qui déshumanise les membres des minorités ethnoreligieuses et encourage ainsi la haine raciale et ethnique
L’expert a demandé si l’Iran entendait adopter une loi antidiscrimination unique, qui couvrirait tous les aspects de la discrimination.
Un autre expert a prié la délégation de dire si l’Iran disposait de données de population ventilées par appartenance ethnique et religieuse, et si les personnes réfugiées et demandeuses d’asile y étaient incluses. L’insistance du Comité à connaître la composition ethnique de l’Iran, a-t-il été souligné, s’explique par l’importance de pouvoir identifier d’éventuelles discriminations envers tel ou tel groupe de population.
Plusieurs questions des experts ont porté sur l’avancement du projet de loi concernant la création d’une institution nationale de droits de l’homme indépendante. Un expert a en outre voulu savoir quels secteurs concernés par la lutte contre la discrimination raciale étaient touchés par les mesures coercitives unilatérales visant l’Iran. Des experts ont salué l’accueil par l’Iran d’un très grand nombre de réfugiés, mais des préoccupations ont été exprimées s’agissant du traitement réservé aux ressortissants afghans en Iran, qui seraient confrontés à une discrimination généralisée, voire à des actes de violence de la part de la police.
D’autres experts ont salué les efforts de l’Iran dans la défense de causes justes et il a été demandé au Comité de ne pas reprendre les discours haineux entretenus par certains États envers l’Iran.
Présentant le rapport, M. Ali Bahreini, Représentant permanent de la République islamique d’Iran auprès des Nations Unies à Genève, a expliqué que l'Iran était historiquement constituée de différentes communautés ethniques unifiées dans la diversité, aucune de ces communautés ethniques n’étant mineure et toutes ayant joué un rôle majeur dans la construction du pays. Les Iraniens jouissent de droits égaux, quelle que soit la tribu ou le groupe ethnique auquel ils appartiennent – la couleur, la race, la langue et autres considérations de ce type ne pouvant justifier des privilèges particuliers, a insisté M. Bahreini.
L'Iran a consenti d’importants efforts pour appliquer les dispositions de la Convention, de même que pour sensibiliser le public à cet égard, a poursuivi le Représentant permanent. Dans le même temps, a-t-il souligné, les mesures coercitives unilatérales, en tant qu'élément discriminatoire fondé sur la nationalité des individus et des pays, causent des dommages considérables à tous les niveaux de la vie du peuple iranien et peuvent, dans de nombreux cas, entraîner des effets assimilables à des crimes contre l'humanité à l'encontre du peuple iranien.
Outre le fardeau des mesures coercitives unilatérales, l'Iran accueille des millions de réfugiés étrangers et de personnes déplacées, principalement en provenance de l'Afghanistan, a d’autre part rappelé M. Bahreini. Cet accueil, qui consomme une grande partie des ressources nationales, n'est pas dûment pris en compte et ce fardeau n'est pas partagé de manière responsable par la communauté internationale, a-t-il regretté.
La délégation iranienne était également composée, entre autres, de représentants des Ministères des affaires étrangères, de l’éducation, du travail, de la culture et de l’orientation islamique. Le Parlement, le pouvoir judiciaire, le Conseil supérieur des droits de l’homme et la Vice-Présidence pour les femmes et les affaires familiales étaient aussi représentés.
Pendant le dialogue, la délégation a assuré qu’il n’existait pas de discrimination systémique en Iran : la Constitution garantit les droits de toute la population et de nombreux mécanismes existent pour garantir la réalisation de ces droits, a-t-elle souligné. La délégation a aussi insisté sur l’importance que les autorités accordent à l’intégration des minorités ethnoreligieuses et ethniques dans la vie du pays. Elle a regretté que le Comité relaie certaines informations qui ne reflètent pas la réalité en Iran.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Iran et les publiera à l’issue de sa session, le 23 août prochain.
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport du Pakistan.
Examen du rapport de la République islamique d’Iran
Le Comité est saisi du rapport valant vingtième à vingt-septième rapports périodiques de la République islamique d’Iran (CERD/C/IRN/20-27).
Présentation du rapport
Présentant le rapport de son pays, M. ALI BAHREINI, Représentant permanent de la République islamique d’Iran auprès des Nations Unies à Genève, a d’abord expliqué que l'Iran était historiquement constituée de différentes communautés ethniques unifiées dans la diversité, aucune de ces communautés ethniques n’étant mineure et toutes ayant joué un rôle majeur dans la construction du pays. Les Iraniens jouissent de droits égaux, quelle que soit la tribu ou le groupe ethnique auquel ils appartiennent – la couleur, la race, la langue et autres considérations de ce type ne pouvant justifier des privilèges particuliers, a dit M. Bahreini.
Dans une perspective internationale, a ajouté M. Bahreini, la République islamique d'Iran attache une grande importance à la Conférence mondiale contre le racisme qui s'est tenue à Durban (en 2001) ainsi qu'à la Déclaration et au Programme d'action qui en sont issues.
L'Iran, a poursuivi M. Bahreini, a consenti d’importants efforts pour appliquer les dispositions de la Convention et les recommandations y associées, de même que pour sensibiliser le public à cet égard. Dans le même temps, a-t-il ajouté, les mesures coercitives unilatérales, en tant qu'élément discriminatoire fondé sur la nationalité des individus et des pays, causent des dommages considérables à tous les niveaux de la vie du peuple iranien et peuvent, dans de nombreux cas, entraîner des effets assimilables à des crimes contre l'humanité à l'encontre du peuple iranien. Leurs effets négatifs sont reconnus par le Secrétaire général des Nations Unies et par le mandat de Rapporteur spécial sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur la jouissance des droits de l'homme, a rappelé M. Bahreini
Outre le fardeau des mesures coercitives unilatérales, l'Iran accueille des millions de réfugiés étrangers et de personnes déplacées, principalement en provenance de l'Afghanistan, a poursuivi le Représentant permanent. Cet accueil, qui consomme une grande partie des ressources nationales, n'est pas dûment pris en compte et ce fardeau n'est pas partagé de manière responsable par la communauté internationale, a-t-il regretté.
M. Bahreini a ensuite souligné que le rapport soumis par son pays exposait les progrès législatifs et exécutifs liés à l'élimination de la discrimination raciale conformément aux dispositions de la Convention. Le rapport aborde des sujets tels que les cadres juridiques, judiciaires et administratifs et les normes de lutte contre la discrimination ou encore le soutien aux régions défavorisées et moins développées. La participation et les contributions des organisations non gouvernementales à son élaboration ont ajouté à la richesse du rapport, a affirmé le Représentant permanent.
Au cours de la période couverte par le présent rapport, l'Iran a connu des gouvernements d'horizons politiques différents, mais ayant le même objectif de développement national et d'éradication de la pauvreté et de la discrimination, a d’autre part souligné le Représentant permanent. Trois plans nationaux de développement limités dans le temps ont été réalisés et de nombreux projets de développement préétablis ont été mis en œuvre, a-t-il ajouté.
Questions et observations des membres du Comité
S’agissant d’abord du cadre d’application de la Convention, M. MICHAL BALCERZAK, membre du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport de la République islamique d’Iran, a voulu savoir si l’interdiction de la discrimination prévue par la Constitution iranienne s’appliquait non seulement au peuple iranien mais aussi à toutes les autres personnes relevant de la juridiction du pays. Il a également voulu savoir comment étaient réglées les contradictions éventuelles entre les dispositions de la législation nationale et celles de la Convention. L’expert a aussi demandé quelles sanctions étaient prévues pour les actes de discrimination.
L’expert a ensuite voulu savoir si le nouveau Code de procédure pénale contient des dispositions garantissant que les personnes appartenant à des minorités ethniques ou linguistiques peuvent bénéficier des services d'interprètes.
M. Balcerzak a aussi voulu savoir si la Convention était traduite en persan et dans d’autre langues utilisée dans le pays, et si l’Iran tenait compte de la Recommandation générale n°36 (2020) du Comité concernant la prévention et la lutte contre le profilage racial par la police.
M. Balcerzak a ensuite demandé si l’Iran entendait adopter une loi antidiscrimination unique, qui couvrirait tous les aspects de la discrimination. Il s’est interrogé sur les fonctions et l’efficacité du Conseil supérieur des droits de l’homme en matière de lutte contre la discrimination.
L’expert a d’autre part voulu savoir quelle définition la loi iranienne donnait du « discours incitant à la haine » et comment ce type de discours était sanctionné. M. Balcerzak a par ailleurs relevé que le Code pénal iranien imposait de lourdes peines à toute personne qui « insulte » les religions légalement reconnues et les ethnies iraniennes : cette disposition peut imposer une restriction considérable à la liberté d'expression, a-t-il fait remarquer. Il a demandé comment l’Iran s'assurerait que la loi n'est pas appliquée de manière sélective et arbitraire à l'encontre de membres de groupes spécifiques, en particulier de groupes vulnérables à la discrimination.
L’expert a demandé des exemples d’application de la loi de 2016 réprimant « l'utilisation de la propagande pour créer des dissensions entre les différents secteurs de la société sous le prétexte de la race, de la culture ou de la religion ». Il a prié la délégation de commenter l’affirmation selon laquelle la loi restreindrait la liberté d'expression et la liberté de la presse en Iran.
Le Comité, a poursuivi M. Balcerzak, a reçu des informations selon lesquelles les minorités ethniques, religieuses et autres relevant de la juridiction de l'Iran, en particulier les Kurdes sunnites et les Baloutches, sont victimes d'une discrimination qui, selon plusieurs sources, se manifesterait de façon structurelle et systémique. Les régions habitées par des populations ethnolinguistiques souffriraient ainsi de privations économiques et de sous-investissement, ce qui entraîne une situation de pauvreté. Une « suppression culturelle » est aussi signalée, avec l'érosion des langues et des traditions locales. De plus, les enfants baloutches et kurdes seraient empêchés de recevoir une éducation dans leur langue maternelle.
Selon d’autres informations, a poursuivi l’expert, les représentants de minorités ethniques subissent des mesures répressives telles que les exécutions extrajudiciaires et les disparitions forcées ; la population kurde et baloutche serait la plus touchée par ces mesures.
Le Comité, a ajouté M. Balcerzak, est aussi informé que les minorités ethniques, religieuses et autres, en particulier les Kurdes et les Baloutches, majoritairement sunnites, ainsi que les Turcs azerbaïdjanais et les Arabes ahwazis, ont été touchés de manière disproportionnée par la réponse du Gouvernement aux manifestations de septembre 2022 après la mort de Mahsa Amini. Il a été rapporté que les forces de sécurité ont tué et blessé un grand nombre de manifestants dans des régions majoritairement peuplées par des minorités, a indiqué M. Balcerzak.
Le Comité a aussi reçu des informations selon lesquelles des femmes et des enfants manifestants appartenant à des minorités ethniques et religieuses ont été exposés à des meurtres ainsi que des actes de torture, des viols et d'autres formes de violence sexuelle, a poursuivi M. Balcerzak. L’expert a en outre mentionné le cas de Reza Resaei, 24 ans, membre de l'ethnie kurde, exécuté le 6 août 2024.
L’expert a aussi fait état d’informations selon lesquelles des membres de minorités ethnolinguistiques et ethnoreligieuses ont été soumis à la torture et à d'autres formes de mauvais traitements, ainsi qu'à des détentions arbitraires. Il a demandé si les membres des forces de l'ordre ou de l'armée qui ont eu recours à la force meurtrière avaient fait l’objet d’enquêtes et où en était, d’autre part, l'enquête concernant les allégations d’empoisonnements dans les écoles.
Le Comité, a poursuivi M. Balcerzak, est aussi préoccupé par l'utilisation d'un langage qui déshumanise les membres des minorités ethnoreligieuses et encourage ainsi la haine raciale et ethnique, ce qui est interdit par l'article 4 de la Convention. Ainsi, selon de nombreuses informations, les hauts fonctionnaires, les forces de l'ordre et les médias contrôlés par l'État qualifient les Kurdes, les Baloutches et les Arabes ahwazi de « séparatistes », de « terroristes », ou encore d’« agents étrangers » ; et les minorités religieuses bahaïe et derviche gonabadi sont dépeintes comme des « sectes perverses ».
L’expert a demandé si les langues des minorités ethnoreligieuses étaient enseignées dans les écoles et si elles pouvaient être utilisées dans la vie publique. Il a d’autre part relevé que de nombreux postes de haut niveau en Iran, y compris ceux de Président, de ministre et de gouverneur de province, sont réservés aux musulmans chiites. De plus, [seuls] cinq des 290 sièges de l’Assemblée consultative islamique sont réservés aux « minorités religieuses », a constaté M. Balcerzak.
L’interdiction de la discrimination dans la loi doit s’accompagner de mesures concrètes, a déclaré l’expert. Il a insisté sur le fait que le Comité se préoccupait de la situation de tous les groupes de population qui, dans un pays, n’appartiennent pas à l’ethnie majoritaire.
M. Balcerzak a insisté sur le fait que le Comité était composé d’experts indépendants, qui traitent tous les pays sur le même pied d’égalité. Le Comité ne pose pas de jugement de valeur, mais souhaite faire en sorte que la population iranienne puisse bénéficier des protections offertes par la Convention, a expliqué l’expert.
S’agissant des statistiques, M. CHRISPINE GWALAWALA SIBANDE, membre du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport de la République islamique d’Iran, a prié la délégation de dire si l’Iran disposait de données démographiques ventilées par appartenance ethnique et religieuse et si les personnes réfugiées et demandeuses d’asile y étaient incluses. Selon les informations en possession du Comité, certains groupes sont victimes de discrimination, a-t-il relevé.
L’expert a demandé des explications sur la situation juridique des groupes religieux minoritaires autres que ceux reconnus par la Constitution iranienne, à savoir les zoroastriens, les juifs et les chrétiens ; il s’est en outre enquis de ce qui était fait pour que les musulmans chiites et sunnites jouissent de droits égaux en Iran.
M. Sibande a demandé si le programme d'assurance médicale des familles rurales couvrait aussi les peuples iraniens lur, tat, talysh, baloutche et kazakh, entre autres groupes. D’autres questions de l’expert ont porté sur la possibilité de créer des partis politiques en Iran.
M. Sibande a par la suite demandé comment le pays traitait la question de l’apatridie et l’enregistrement des naissances parmi les migrants, les demandeurs d'asile, les réfugiés et les apatrides. Les ressortissants afghans en Iran seraient confrontés à une discrimination généralisée, voire à des actes de violence de la part de la police, et un grand nombre d’entre eux auraient été expulsés, a relevé l’expert. Il s’est enquis des mesures prises pour renforcer l'éducation aux droits de l'homme afin de lutter contre les préjugés et l'intolérance à l'égard des réfugiés.
Une experte membre du Comité a fait remarquer que la compilation de statistiques ethniques de population sur la base de l’auto-identification des personnes interrogées devrait permettre de remédier aux objections à la tenue de telles données.
Un expert s’est enquis des progrès réalisés par l’Iran dans la lutte contre la discrimination raciale depuis le précédent examen devant le Comité, en 2010.
L’insistance du Comité à connaître la composition ethnique de l’Iran, a souligné l’expert, s’explique par l’importance de pouvoir identifier d’éventuelles discriminations envers tel ou tel groupe de population.
Un autre expert s’est enquis du bilan de l’activité du Conseil pour la réconciliation des groupes ethniques créé en 2015.
Il a été demandé combien d’organisations non gouvernementales (ONG) étaient actives dans le domaine de la lutte contre la discrimination en Iran.
Plusieurs questions des experts ont porté sur l’avancement du projet de loi concernant la création d’une institution nationale de droits de l’homme indépendante.
Un expert a demandé quels secteurs concernés par la lutte contre la discrimination raciale étaient touchés par les mesures coercitives unilatérales visant l’Iran.
D’autres préoccupations ont été exprimées pendant le dialogue s’agissant des mariages d’enfants dans les régions rurales en Iran ou encore du grand nombre d’exécutions de femmes ayant été elles-mêmes victimes de violences domestiques.
D’autres experts ont salué les efforts de l’Iran dans la défense de causes justes et il a été demandé au Comité de ne pas s’adonner aux discours haineux entretenus par certains États envers ce pays.
Plusieurs experts ont salué l’accueil par l’Iran d’un très grand nombre de réfugiés.
Réponses de la délégation
Le texte de la Convention traduit en persan est disponible sur le site du Parlement iranien, a précisé la délégation.
Les instruments internationaux ratifiés par l’Iran ont force contraignante pour le pays et sont fréquemment invoqués devant les tribunaux, a indiqué la délégation. L’harmonisation de la loi et des règlements avec ces instruments se fait en continu afin d’éviter toute discrimination, a-t-elle ajouté ; la définition de la discrimination en Iran est identique à celle de la Convention, a-t-elle assuré.
Les sunnites ne sont pas considérés comme une minorité religieuse car ils font partie de la communauté musulmane en Iran et bénéficient donc exactement des mêmes droits que les chiites, a d’autre part indiqué la délégation. Il n’y a pas non plus de différence entre sunnites et chiites dans la loi pénale, a-t-elle ajouté. Nul n’est tenu de préciser son affiliation religieuse devant un tribunal pénal ou administratif et tout magistrat qui se livrerait à un acte discriminatoire serait révoqué, a insisté la délégation.
Sur le plan religieux, toutes les branches de l’islam sont reconnues, a par la suite insisté la délégation. Le Parlement iranien compte 21 députés sunnites et l’on recense 70 000 mosquées de la même obédience, a-t-elle précisé. En réponse à la question d’un expert, la délégation a ajouté ne pas avoir connaissance de la présence d’Ahmadis en Iran.
La délégation a ensuite déclaré que la stratégie de son pays en matière de lutte contre la discrimination raciale était notamment basée sur l’article 9 de la Constitution, qui interdit cette pratique, et sur la loi relative au travail, qui interdit la discrimination au travail. En outre, le programme de développement quinquennal est axé sur le développement social et vise lui aussi l’élimination de la discrimination raciale.
Une autre priorité du Gouvernement est la lutte contre la corruption, un problème qui est à l’origine de manifestations de discrimination raciale, a ajouté la délégation.
Les Iraniens estiment tous appartenir à une seule race, « la race perse », a poursuivi la délégation ; le problème de la discrimination raciale ne se pose donc pas, a-t-elle déclaré. Toutes les personnes en Iran constituent une même nationalité, a insisté la délégation. À ce titre, tous les Iraniens jouissent des mêmes possibilités. Les données ethniques dans le recensement ne sont pas utiles dans la mesure où les programmes de développement visent essentiellement les provinces, a d’autre part expliqué la délégation.
L’Iran est composée depuis toujours de nombreuses ethnies solidaires, a continué la délégation. Les ethnies sont très mélangées en Iran, avec de nombreux mariages mixtes, sans limitation. L’Iran est une mosaïque de personnes égales devant la loi, a par la suite ajouté la délégation.
La délégation a insisté sur l’importance que les autorités accordent à l’intégration des minorités ethnoreligieuses et ethniques dans la vie du pays. Elle a précisé que 9500 organisations non gouvernementales culturelles étaient actives en Iran, y compris dans la région du Kurdistan et de l’Azerbaïdjan iraniens. Le Président de la République dispose d’un conseiller – kurde – en charge des questions relatives aux minorités. Le chef des armées est également d’origine kurde, a fait valoir la délégation.
Il n’existe pas de discrimination systémique en Iran, a assuré la délégation. La Constitution iranienne garantit les droits de toute la population, y compris ceux des Iraniens de l’étranger, et de nombreux mécanismes existent pour garantir la réalisation de ces droits. Les droits des ressortissants étrangers en Iran sont eux aussi protégés par la Constitution.
Il est faux de dire que l’Iran cherche à supprimer les langues minoritaires, a par ailleurs assuré la délégation. De nombreux journaux et stations de radio diffusent des informations dans les langues locales, outre les émissions du diffuseur public en langue kurde, entre autres, a-t-elle souligné. La délégation a par ailleurs mentionné l’organisation de nombreux festivals et autres manifestations culturelles propices au maintien de la diversité du pays ; chrétiens et juifs reçoivent un budget pour réaliser leurs propres activités culturelles, a-t-elle indiqué. Il existe aussi de très nombreux de lieux de culte pour les religions minoritaires, a ajouté la délégation.
Le persan (farsi), langue nationale en Iran, est aussi la langue d’enseignement, a rappelé la délégation, avant de préciser que d’autres langues peuvent être utilisées dans les écoles en fonction des besoins des communautés locales. Il n’existe pas moins de quarante écoles kurdes dans la seule ville de Téhéran, a précisé la délégation, qui a aussi mentionné des établissements où les cours sont dispensés en langues turque, azérie ou encore baloutche.
Les maisons d’édition ont publié quelque 200 ouvrages à l’intention des minorités juive, zoroastrienne et assyrienne. Dans les régions les plus défavorisées, les éditeurs reçoivent des subventions et autres aides financières pour publier ce type d’ouvrages dans les langues minoritaires, a par ailleurs indiqué la délégation.
La délégation a insisté sur le fait que Kurdes, Baloutches et sunnites, notamment, constituaient, eux aussi, l’Iran d’aujourd’hui, et qu’ils étaient respectés à ce titre. Les enfants de ces minorités peuvent recevoir une éducation dans leur langue ; et quelque 7000 écoles ont été construites dans les provinces concernées, a-t-il été précisé.
Le nombre de parlementaires est fixé par des critères démographiques et l’on compte 22 parlementaires sunnites, a d’autre part fait savoir la délégation.
Le Gouvernement procède à des recensements décennaux dont les données sont ventilées selon des indicateurs excluant le critère ethnique ou racial, a-t-elle souligné.
L’Iran accueille plus de 3,4 millions d’Afghans, a par ailleurs précisé la délégation.
Les statistiques relatives aux personnes détenues ne sont pas ventilées par origine ethnique, a également précisé la délégation en réponse à une autre question.
Les droits des accusés et des détenus sont respectés en Iran et le système législatif iranien interdit toute discrimination envers les prévenus déférés à la justice, a ajouté la délégation.
S’agissant de l’accès à la justice, les minorités religieuses peuvent recourir à des tribunaux spécialisés composés de magistrats issus des communautés concernées, a-t-il notamment été précisé. Le respect pour les minorités se manifeste aussi au sein de la justice, a assuré la délégation à plusieurs reprises.
La consommation d’alcool par un chrétien n’est pas illégale en Iran, a par ailleurs fait savoir la délégation. Toute personne victime de discrimination peut porter plainte devant la justice, a-t-elle assuré.
Le Conseil supérieur des droits de l’homme a pour objectif de défendre les Iraniens contre toute discrimination et toute forme d’oppression, a indiqué la délégation. Il prodigue aussi une assistance consultative aux magistrats.
Un projet de loi sur l’institution nationale de droits de l’homme est à l’étude au Parlement, a en outre fait savoir la délégation. Il a été précisé par la suite que le projet de création d’une institution nationale de droits de l’homme avait été déposé en 2021.
L’action des autorités vise d’abord les femmes et les personnes défavorisées à travers les différentes provinces du pays, a ensuite indiqué la délégation. À cet égard, a-t-elle ajouté, le Gouvernement applique depuis peu un indice d’égalité des sexes et il procède actuellement à une cartographie de la situation des femmes dans toutes les provinces du pays.
Le Gouvernement estime être obligé de satisfaire aux besoins de santé de tous les citoyens sans discrimination, a d’autre part affirmé la délégation. Il tient compte, ce faisant, des besoins des personnes vivant dans les régions défavorisées.
La loi sur la presse réprime les discours incitant à la haine et les insultes envers les religions, les minorités et les femmes, compte tenu des conséquences néfastes de ces discours sur la coexistence pacifique, a poursuivi la délégation. Les directeurs des organes de presse et autres médias sont bien informés de la législation et des règlements en vigueur, a-t-elle assuré, avant d’ajouter que les responsables de sites web sont tenus de supprimer les contenus attentatoires aux minorités et aux religions. La délégation a mentionné des poursuites engagées contre un média ayant incité à la haine contre les Afghans.
L’article premier du Code pénal relatif à l’incitation à la discrimination raciale, adopté en 1977 et modifié par la suite, est toujours en vigueur, a indiqué la délégation.
La délégation a d’autre part souligné que le pouvoir dont jouissent certains pays ne devrait pas leur permettre de discriminer d’autres pays.
La délégation a précisé que les mesures coercitives unilatérales compromettaient les efforts de l’Iran en matière de santé, d’éducation et de sécurité sociale et entraînaient une progression de la pauvreté dans les régions rurales. Des problèmes sont à signaler dans l’accès à certains médicaments et dans le recul de la croissance économique ces dernières années. Il s’agit là d’un cas grave de discrimination envers l’Iran, a affirmé la délégation.
Plusieurs centaines d’organisations non gouvernementales (ONG) sont actives dans la lutte contre la discrimination en Iran, a par ailleurs souligné la délégation.
La loi sur les partis politiques de 2016 et la loi sur les activités des ONG encadrent le fonctionnement de ces institutions, a précisé la délégation. Plus de 143 partis ont reçu une autorisation de fonctionner au titre de la loi, a-t-elle indiqué.
S’agissant des événements survenus en 2022, la délégation a indiqué que l’instance nationale des droits de l’homme avait traité avec sérieux les allégations relatives au comportement d’agents des forces de l’ordre.
Un mineur impliqué dans la mort d’un policier a été condamné à mort. Conformément au Code pénal iranien, son exécution ne pourra intervenir qu’à sa majorité ; et un appel est toujours possible, a souligné la délégation.
L’affaire des empoisonnements dans des écoles n’a pas seulement concerné les régions où vivent des minorités, contrairement à ce qui a été dit, a par ailleurs déclaré la délégation : les enquêtes en cours s’étendent à l’ensemble du pays et l’exécutif a demandé que toute la lumière soit faite à ce sujet. La délégation a regretté à ce propos que le Comité relaie des informations qui ne reflètent pas la réalité en Iran.
La délégation a ensuite indiqué que le Code civil iranien posait des conditions au mariage de mineurs : en particulier, un examen psychosocial et l’aval d’un juge. Les autorités préconisent des changements progressifs pour diminuer le nombre de ces unions – des changements basés sur l’obtention du consentement des populations, a précisé la délégation. Elle a fait état d’une chute de 33% du nombre de mariages de très jeunes filles depuis quelques années.
La délégation a d’autre part décrit les mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre le chômage et la discrimination dans le domaine du travail et de l’emploi. Les statistiques montrent à cet égard qu’il n’y a pas de différence marquée entre les provinces, a fait valoir la délégation, avant de déplorer les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur la création d’emplois.
Les Afghans en Iran jouissent des même services et aides que les Iraniens, y compris dans le domaine de l’éducation et de l’emploi, a d’autre part souligné la délégation. En 2021, à la suite du retrait américain de l’Afghanistan, l’Iran a reçu de très nombreux Afghans, qui seraient aujourd’hui plus de trois millions, dont certains en situation irrégulière. Nombre d’entre eux cherchent à rejoindre l’Occident, a indiqué la délégation. La sécurité des Afghans en Iran est assurée, a-t-elle ajouté.
Remarques de conclusion
M. BALCERZAK a remercié la délégation pour ce dialogue très intense qui a permis au Comité de recueillir des informations utiles – que le Comité fera tout son possible pour traiter sur la base de son mandat. Organe neutre et indépendant, le Comité veille à ce que tout ce qui est dit pendant les dialogues soit dans l’intérêt de la population des pays concernés, a insisté M. Balcerzak. L’Iran étant partie à la Convention depuis 1968, des changements sont inévitablement intervenus [depuis cette date]: le Comité continuera de s’intéresser à l’application de cet instrument aujourd’hui, a indiqué l’expert.
M. BAHREINI a insisté sur le fait que la croissance des indicateurs socioéconomiques révélait l'existence d'un développement global dans toutes les régions du pays, sans discrimination entre les unes et les autres. Le Gouvernement est conscient des besoins spécifiques et des vulnérabilités des villes frontalières et des provinces de l'est et de l'ouest, qui découlent de leur situation géopolitique. Les mesures coercitives unilatérales ont considérablement freiné ses projets de développement, a insisté le Représentant permanent.
M. Bahreini a ensuite déploré la discrimination à l'encontre des Palestiniens, qui conduit à la violation de leurs droits fondamentaux. L’Iran attend de tous les mécanismes des droits de l'homme des Nations Unies qu'ils suivent de près cette situation désastreuse et qu’ils prennent les mesures appropriées pour la prévenir et rendre justice au peuple palestinien, a déclaré M. Bahreini.
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CERD24.010F