Fil d'Ariane
Examen de l’Irlande devant le Comité des droits de l’enfant : les experts font état de préoccupations s’agissant de la discrimination à l’égard de plusieurs catégories d’enfants et de l’accès aux services de santé
Le Comité des droits de l’enfant a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique soumis par l’Irlande au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant.
Un expert membre du Comité a estimé que la discrimination restait un « problème majeur » en Irlande, non seulement à l’égard des enfants roms et travellers, mais aussi à l’égard des enfants LGBTI, d’ascendance africaine ou encore requérants d’asile. Les enfants avec lesquels le Comité s’est entretenu ont mentionné leur difficulté à trouver des mécanismes auxquels faire part de leurs doléances s’agissant de ces discriminations, a ajouté cet expert. Le plan d’action national contre le racisme, dont l’adoption devait se faire au début de 2023, se fait toujours attendre, a-t-il en outre fait remarquer.
Un autre expert s’est dit étonné, à la lecture des statistiques, que l’Irlande ne fasse pas partie des tous premiers pays s’agissant de la santé mentale des enfants. Il a pointé à cet égard des préoccupations relatives aux coûts et à l’accès aux services.
Par ailleurs, le Médiateur reçoit de nombreuses plaintes d’enfant placés victimes de violences ou qui estiment que leurs opinions ne sont pas entendues, a souligné un expert. Il a également regretté une mise en œuvre « médiocre ou inexistante » des textes de loi et règlements relatifs à la prise en compte des besoins des mineurs par le système de justice.
La maltraitance d’enfants par le clergé, qui a reçu beaucoup d’attention ces dernières années en Irlande, est relativement passée sous silence dans la documentation reçue par le Comité, a fait remarquer un expert, avant de souligner que les victimes de ce problème systématique devaient voir leurs besoins satisfaits.
S’agissant de la situation des enfants handicapés en Irlande, le grand problème concerne la question de l’éducation inclusive, a-t-il par ailleurs été souligné. En effet, quelque 17 000 enfants handicapés sont scolarisés dans des écoles spéciales, pour lesquelles les listes d’attente sont longues, et plus de 20% des familles ayant des enfants en situation de handicap ne bénéficient pas des services spécialisés auxquels elles ont droit – certaines disent attendre ces services depuis plusieurs années, a dit un expert.
Au cours du dialogue, plusieurs experts ont salué la manière dont l’Irlande prend actuellement en charge de nombreux enfants ukrainiens. Il a été demandé si les autorités irlandaises s’efforçaient aussi de réunir des enfants ukrainiens séparés de leurs parents abrités dans d’autres pays.
Présentant le rapport de son pays, M. Roderic O’Gorman, Ministre de l’enfance, de l’égalité, du handicap, de l’intégration et de la jeunesse de l’Irlande, a notamment mis en avant, s’agissant du handicap, le Modèle d’accessibilité et d’inclusion, introduit il y a quelques années, qui offre un soutien pratique et sur mesure basé sur les besoins et qui ne requiert pas de diagnostic officiel de handicap. M. O’Gorman a reconnu que des défis très importants restaient à relever et a indiqué que le prochain transfert, vers son Ministère, des fonctions relatives au handicap permettrait de rassembler les éléments opérationnels et politiques afin d’assurer une approche plus globale dans ce domaine.
Le Ministre a aussi fait état de progrès considérables réalisés depuis dix ans par son pays pour améliorer l'accès à un apprentissage précoce et à une garde d'enfants abordables et de haute qualité. Ainsi, l'investissement annuel de l'État dans la fourniture de services pour la petite enfance a presque quadruplé depuis 2015, a-t-il fait valoir.
M. O’Gorman a ajouté que, depuis l'invasion de l'Ukraine par la Fédération de Russie, plus de 71 000 personnes étaient arrivées en Irlande en provenance d'Ukraine, dont environ un tiers sont des mineurs de moins de 18 ans. En mars 2022, le Ministère de l’éducation a mis en place des équipes régionales pour l’éducation et la langue (REALT) afin de soutenir les besoins d’éducation de ces enfants.
Le Ministre a par ailleurs indiqué que les enfants qui arrivent en Irlande en tant que mineurs non accompagnés font l’objet d’une évaluation complète de leurs besoins et qu’un financement de 5 millions d'euros a été dégagé pour le recrutement de familles d'accueil spécialisées.
Outre M. O’Gorman et plusieurs de ses collaborateurs directs, la délégation irlandaise était composée, entre autres, de représentants des Ministères (Départements) des affaires étrangères, de la justice, des finances, de l’éducation et de la santé, ainsi que du parquet.
Pendant le dialogue noué avec les membres du Comité, la délégation a indiqué que l’Irlande appliquait d’ores et déjà une stratégie d’inclusion des enfants roms et travellers. Des aides sont accordées aux Travellers pour améliorer leur logement et une loi adoptée l’an dernier contient plusieurs objectifs concernant l’amélioration de leur santé, a-t-elle précisé.
La délégation a aussi fait savoir que les enfants ayant des besoins de santé mentale sont considérés comme prioritaires et que leur prise en charge est assurée dans les trois jours. La part du budget consacrée à la santé mentale a augmenté depuis 2021 et le Gouvernement a investi dans la qualité des services fournis et dans la réduction des temps d’attente, a souligné la délégation.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Irlande et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 3 février prochain.
Demain après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport de la Nouvelle-Zélande.
Examen du rapport de l’Irlande
Le Comité est saisi du document valant cinquième et sixième rapports périodiques de l’Irlande (CRC/C/IRL/5-6), établi sur la base d’une liste de points à traiter qui avait été soumise par le Comité.
Présentation du rapport
Présentant le rapport de son pays, M. RODERIC O’GORMAN, Ministre de l’enfance, de l’égalité, du handicap, de l’intégration et de la jeunesse de l’Irlande, a déclaré qu’à l’instar d’autres pays, l’Irlande a été confrontée ç des défis significatifs ces dernières années, en particulier au Brexit, à la COVID-19, à la guerre injustifiée de la Fédération de Russie en Ukraine et aux hausses du prix de l’énergie qui en a résulté, ainsi qu’au flux croissants de déplacements forcés à travers le monde. En dépit de ces défis, l’Irlande est parvenue à faire des progrès dans un certain nombre de domaines, a-t-il souligné. Il a notamment fait état de progrès considérables réalisés depuis dix ans par son pays pour améliorer l'accès à un apprentissage précoce et à une garde d'enfants abordables et de haute qualité. Ainsi, l'investissement annuel de l'État dans la fourniture de services pour la petite enfance a presque quadruplé, passant de 260 millions d'euros en 2015 à 1,025 milliard d'euros en 2023, a-t-il fait valoir. Le programme de soins et d’éducation pour la petite enfance (Early Childhood Care and Education Programme - ECCE) fournit désormais à tous les enfants âgés de 2 ans et 8 mois à 5 ans et 6 mois deux années d’éducation préscolaire financée par l’État, trois heures par jour et cinq jours par semaine, a-t-il précisé.
En outre, a poursuivi le Ministre, le régime national de soins aux enfants (National Childcare Scheme - NCS, 2019) offre une combinaison de subventions universelles et ciblées, ainsi que des services gratuits pour les enfants vulnérables : plus de 100 000 enfants bénéficient actuellement du NCS, soit deux fois plus que l'année dernière à la même époque.
D’autre part, un nouveau volet de financement est en cours d'élaboration pour aider les enfants et les familles défavorisés à accéder aux services de garde d'enfants, tandis que la fourniture de repas chauds aux enfants dans les structures d'apprentissage et d'accueil de la petite enfance dans les zones défavorisées fait l'objet d'un projet pilote.
Le Ministre a par ailleurs fait valoir que le Modèle d’accessibilité et d’inclusion introduit il y a quelques années bénéficie à des milliers de personnes et permets aux fournisseurs de services d’apporter une expérience préscolaire inclusive aux enfants bénéficiant du programme ECCE. Ce Modèle offre un soutien pratique et sur mesure basé sur les besoins et ne requiert pas de diagnostic officiel de handicap, a expliqué M. O’Gorman. En termes de handicap, d’une manière plus générale, il a reconnu que des défis très importants restaient à relever et a indiqué que le prochain transfert vers son Ministère des fonctions relatives au handicap permettrait de rassembler les éléments opérationnels et politiques afin d’assurer une approche plus globale dans ce domaine.
M. O’Gorman a en outre indiqué avoir présenté un projet de loi sur l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée, qui prévoit de prolonger le congé parental rémunéré et d’étendre de six mois actuellement à deux ans la durée du droit légal à des pauses d'allaitement après la naissance d’un enfant.
D’autre part, depuis l'invasion de l'Ukraine par la Fédération de Russie en février 2022, plus de 71 000 personnes sont arrivées en Irlande en provenance d'Ukraine, dont environ un tiers sont des mineurs de moins de 18 ans, a fait savoir le Ministre. Il a notamment précisé qu’en mars 2022, le Ministère de l’éducation avait mis en place des équipes régionales pour l’éducation et la langue (REALT) afin de soutenir les besoins d’éducation des enfants arrivant d’Ukraine en Irlande.
Les enfants qui arrivent en Irlande en tant que mineurs non accompagnés sont pris en charge par Tusla [l’Agence pour l’enfance et la famille] ou se voient offrir des services au titre de la Loi relative à la protection de l’enfance, a d’autre part indiqué M. O’Gorman. Ces enfants font l’objet d’une évaluation complète de leurs besoins, a-t-il souligné, ajoutant qu’un financement de 5 millions d'euros a été dégagé pour le recrutement de familles d'accueil spécialisées (Fáilte Care).
Le Ministre a fait part d’un certain nombre de projets visant à créer un système de justice familiale moderne ; à étendre le système des tuteurs ad litem pour les enfants impliqués dans des procédures de garde parentale ; ou encore à créer des infractions spécifiques lorsqu'un adulte oblige ou incite un enfant à se livrer à une activité criminelle. M. O’Gorman a par ailleurs indiqué qu’en rapport avec la pauvreté et la crise actuelle du coût de la vie, le budget de 2023 de l’Irlande inclut un volet de protection sociale d’une valeur de près de 2,2 milliards de dollars, dont bon nombre de mesures sont destinées aux familles ayant des enfants. « Outre les hausses de transferts sociaux, notre attention doit continuer de se concentrer sur la réduction de la pauvreté infantile », a affirmé le Ministre.
M. O’Gorman a ensuite indiqué que le programme « Garantir l’égalité des chances à l’école » (Delivering Equality of Opportunity in Schools - DEIS), qui apporte un soutien ciblé aux écoles ayant la plus forte concentration d’élèves provenant des zones défavorisées, s’étendait désormais à plus de 240 000 élèves dans plus de 1200 établissements. Le nouveau modèle prend en considération l’important désavantage éducatif subi par les apprenants qui se sont identifiés eux-mêmes comme d’appartenance ethnique traveller ou rom, ainsi que par ceux qui résident dans des centres gérés par le Service d'hébergement de protection internationale, ou qui sont sans abri.
De plus, a fait savoir le Ministre, l'Irlande a mis en place des structures de participation de premier plan pour garantir que les opinions des enfants soient entendues et prises en compte dans l'élaboration des politiques. L'année 2022 a vu l'introduction d'une carte de voyage pour les jeunes, dont l'idée est venue directement du Conseil de la jeunesse.
Enfin, M. O’Gorman a indiqué qu’au cours de l’été 2021, son Ministère avait organisé un processus de consultation avec plus de 1200 enfants et jeunes dans toute l'Irlande concernant leurs droits au titre des différentes conventions de l'ONU.
Questions et observations des membres du Comité
M. CLARENCE NELSON, coordonnateur du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner en détail le rapport de l’Irlande, a estimé que la discrimination restait un « problème majeur » en Irlande, non seulement à l’égard des enfants roms et travellers, mais aussi à l’égard des enfants LGBTI, d’ascendance africaine ou encore requérants d’asile. Les enfants avec lesquels le Comité s’est entretenu lui ont fait part de leur préoccupation face à cette discrimination à tous les niveaux, a-t-il indiqué. Ils ont aussi mentionné leur difficulté à trouver des mécanismes auxquels faire part de leurs doléances s’agissant de ces discriminations, a-t-il ajouté. Le plan d’action national contre le racisme, dont l’adoption devait se faire au début de 2023 selon le rapport, se fait toujours attendre, a aussi fait remarquer M. Nelson.
D’autre part, si le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant est inscrit dans la Constitution, il semble qu’il ne soit pas toujours appliqué dans les affaires concernant l’immigration, l’éducation et les enfants handicapés, a relevé M. Nelson.
L’expert a par ailleurs voulu savoir quel avait été le résultat du référendum de 2016 sur l’abaissement de l’âge de vote à 16 ans. Il a ajouté que les enfants interrogés par le Comité lui ont dit que leur participation au fonctionnement de leurs écoles était seulement symbolique.
M. Nelson a en outre regretté une mise en œuvre « médiocre ou inexistante » des textes de loi et règlements relatifs à la prise en compte des besoins des mineurs par le système de justice.
D’autres questions de l’expert ont porté sur le fonctionnement du système de placement volontaire de mineurs. Le Médiateur, a fait remarquer M. Nelson, reçoit de nombreuses plaintes d’enfant placés victimes de violences ou qui estiment que leurs opinions ne sont pas entendues. Il semble en outre que l’Irlande manque de familles d’accueil.
L’étendue réelle du problème reste à définir s’agissant des enfants punis de retenue ou de mise à l’isolement dans des établissements scolaires et dans d’autres contextes, a d’autre part observé M. Nelson.
M. Nelson a ensuite estimé que le grand problème s’agissant des enfants handicapés en Irlande concernait la question de l’éducation inclusive. Quelque 17 000 enfants handicapés sont scolarisés dans des écoles spéciales pour lesquelles, en outre, les listes d’attente sont longues, a-t-il fait observer. Aussi, a-t-il demandé s’il était envisagé de passer à un modèle plus inclusif.
Plus de 20% des familles ayant des enfants en situation de handicap ne bénéficient pas des services spécialisés auxquels elles ont droit et certaines disent attendre ces services depuis plusieurs années, a poursuivi l’expert. Les coupes budgétaires ont entraîné, depuis trente ans, une détérioration de la situation des enfants handicapés, a-t-il regretté.
M. Nelson a demandé si l’Irlande comptait ratifier le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.
MME MIKIKO OTANI, Présidente du Comité et membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner en détail le rapport de l’Irlande, a rappelé que le Comité avait demandé à l’Irlande, en 2016, d’intégrer à titre prioritaire les dispositions de la Convention dans sa propre législation, afin de mieux appliquer cet instrument.
Le rapport n’indique pas clairement s’il existe une institution chargée de coordonner toute l’action du Gouvernement en faveur de l’enfance, a ensuite fait observer Mme Otani. Elle a ajouté que le budget de l’enfance ne semblait pas contenir de ligne spécifique relative aux enfants roms et travellers.
L’experte a demandé si le budget du Médiateur des enfants était doté de moyens suffisants.
Mme Otani a par ailleurs voulu savoir quels recours étaient ouverts aux enfants dont les droits sont bafoués en Irlande et à l’étranger. Le Comité aimerait en outre savoir si une évaluation a été faite de l’effet des politiques fiscales de l’Irlande sur le respect des droits de l’enfant, a-t-elle ajouté.
Mme Otani a fait part d’un certain nombre d’autres préoccupations concernant des questions liées au refus d’octroyer la nationalité irlandaise pour des motifs invoquant le caractère de la personne ; aux retards dans l’application des dispositions relatives à la protection internationale ; à la reconnaissance juridique des enfants de 16 à 17 ans qui se revendiquent d’un autre genre que celui de leur naissance ; ou encore à l’enseignement religieux.
M. PHILIP D. JAFFÉ, également membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner en détail le rapport de l’Irlande, a constaté que l’on ne disposait pas, depuis 2020, de données concernant le nombre d’actes de violence commis sur des mineurs, y compris pour ce qui est du harcèlement à l’école et du cyberharcèlement.
Le taux d’inculpation pour maltraitance d’enfant reste faible, a par ailleurs relevé M. Jaffé. D’autre part, la maltraitance [d’enfants] par le clergé, qui a reçu beaucoup d’attention ces dernières années en Irlande, est relativement passée sous silence dans la documentation reçue par le Comité, a-t-il ajouté, avant de souligner que les victimes de ce problème systématique devaient voir leurs besoins satisfaits.
L’expert a par ailleurs demandé dans quelle mesure l’avis d’un enfant intersexe était pris en compte au moment de décider d’une intervention chirurgicale sur sa personne.
S’agissant des questions de santé, M. Jaffé s’est dit étonné de constater, à la lecture des statistiques, que l’Irlande ne faisait pas partie des tous premiers pays s’agissant de la santé mentale des enfants. Il a pointé à cet égard des préoccupations relatives aux coûts et à l’accès aux services. Selon certaines informations, a-t-il insisté, des centaines d’enfants devraient attendre plus d’une année un rendez-vous à l’hôpital, a-t-il insisté.
D’autre part, a ajouté l’expert, un quart des femmes roms enceintes en Irlande ne consulteraient de médecin qu’au moment de l’accouchement. S’il a salué la dépénalisation de l’avortement en Irlande, M. Jaffé a en revanche constaté des lacunes dans l’éducation sexuelle à l’école et a demandé ce qu’il en était de la prévalence des grossesses parmi les adolescentes.
MME FAITH MARSHALL-HARRIS, elle aussi membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner en détail le rapport de l’Irlande, a constaté qu’il demeurait dans ce pays des coûts de scolarité cachés, comme ceux induits par l’achat d’uniformes scolaires. L’experte a par ailleurs voulu savoir pourquoi les élèves socialement défavorisés, tels que les enfants roms et travellers, avaient un emploi du temps allégé.
Mme Marshall-Harris s’est enquise de la stratégie d’insertion des enfants roms et travellers – qui ne sont pas reconnus en tant que minorités mais dont l’accès aux services publics est lacunaire, a-t-elle souligné. Elle s’est par ailleurs dite préoccupée par le fait que les écoles financées par les collectivités locales appliquent des politiques d’admission restrictives, ce qui – a-t-elle fait observer – pose un risque d’exclusion sociale. Les enfants requérants d’asile, y compris les enfants ukrainiens, doivent avoir accès aux logements, à l’éducation et au soutien psychosocial, a-t-elle d’autre part souligné.
Mme Marshall-Harris a ensuite recommandé que la nouvelle loi sur l’âge de la responsabilité pénale en Irlande tienne compte des recommandations du Comité.
Une autre experte du Comité a demandé s’il existait en Irlande des mécanismes permettant de contrôler le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant dans les décisions de placement en famille d’accueil.
Une experte a fait remarquer que les châtiments corporels ne semblaient pas interdits au sein de la famille en Irlande. Elle s’est en outre enquise de ce qui était fait contre les mutilations génitales féminines.
Des experts ont salué la manière dont l’Irlande prend actuellement en charge de nombreux enfants ukrainiens. Il a été demandé si les autorités irlandaises s’efforçaient aussi de réunir des enfants ukrainiens séparés de leurs parents abrités dans d’autres pays.
Réponses de la délégation
La nouvelle stratégie pour l’enfance 2023-2028 sera publiée dans le courant de l’année ; elle tiendra notamment compte des recommandations présentées par le Comité au terme du présent examen, ainsi que des contributions de la jeunesse irlandaise consultée, a indiqué la délégation.
Le Ministère de l’enfance, de l’égalité, du handicap, de l’intégration et de la jeunesse procède à une évaluation de l’impact de son action sur les droits de l’enfant, a ajouté la délégation. D’autre part, une étude a été réalisée afin de voir comment pérenniser les budgets et dépenses consacrés à l’enfance. En outre, des propositions ont été faites en vue de renforcer l’indépendance financière du bureau du Médiateur.
La justice irlandaise fait de nombreuses références aux dispositions de la Convention, a souligné la délégation.
La stratégie de la justice relative aux affaires familiales a notamment pour objectif de mettre à disposition des enfants des personnes formées pour les accompagner pendant les audiences et les affaires familiales seront traitées dans des salles d’audience séparées, a par ailleurs indiqué la délégation.
Plusieurs initiatives ont été prises par l’État pour remédier aux milliers d’abus sexuels dans des écoles confessionnelles – abus dont le Rapport Ryan (2009) a dressé la liste, a par ailleurs souligné la délégation. Le Gouvernement a mis en place un mécanisme de soutien et de dédommagement en faveur des victimes : il a reçu quelque 16 600 demandes d’indemnisation pour un montant total de 917 millions d’euros, a-t-elle précisé.
Les fonctionnaires – y compris le personnel de justice – qui travaillent avec les mineurs sont formés à la question de la prévention de la violence envers les enfants, a d’autre part fait valoir la délégation. Le Gouvernement a mené des recherches sur les difficultés rencontrées par les enfants victimes ou témoins de violences familiales, a-t-elle ajouté. Des procédures sont en place au sein de l’agence Tusla pour permettre aux enfants lésés de porter plainte et de rester informés de l’avancement des démarches, a-t-il été expliqué.
Tous les enfants pris en charge par l’État ont accès à un mécanisme de plainte facilitée auprès du Médiateur, du Médiateur pour les enfants ou du mécanisme interne de l’agence Tusla, a par la suite précisé la délégation. Le budget de l’aide juridictionnelle a été augmenté en 2023, a-t-elle en outre indiqué.
Les châtiments corporels sont interdits par une loi adoptée en 2017,a rappelé la délégation. Cette interdiction s’étend aux fonctionnaires et médecins travaillant avec des enfants, a-t-elle précisé. L’agence Tusla gère un système en ligne de formation continue obligatoire au sujet de cette loi, a-t-elle ajouté.
Des poursuites judiciaires ont été lancées dans un cas de mutilations génitales féminines pratiquées hors d’Irlande, a-t-il en été précisé. L’Irlande applique une stratégie de conseil et d’assistance médicale pour les victimes de ces pratiques, a fait savoir la délégation.
Les règles régissant la naturalisation seront révisées dans le sens de la jurisprudence récente des tribunaux, a d’autre part indiqué la délégation.
Chaque école est libre d’organiser ou non d’autres enseignements pour les enfants qui ne souhaitent pas suivre les enseignements religieux, a-t-il aussi été indiqué en réponse à la question d’un expert.
Plusieurs lois, parmi lesquelles celle relative à l’emploi, protègent la population contre toute forme de discrimination, a ensuite fait valoir la délégation. Un processus de réforme en la matière est en cours et la participation des enfants y sera très importante, a-t-elle indiqué. Le Gouvernement est par ailleurs en train de préparer une loi contre les crimes de haine, qui pourrait être adoptée cette année, a-t-elle ajouté. D’autres stratégies sont à l’étude pour l’intégration des femmes et des filles ainsi que pour la lutte contre la stigmatisation des personnes LGBTI+. Le Gouvernement envisage des stratégies tenant compte de l’intersectionnalité, a précisé la délégation.
Un nouveau règlement est en cours d’élaboration pour traiter de la protection des données des mineurs en ligne et de la protection des mineurs contre les contenus nuisibles. Le Gouvernement pourra ordonner la fermeture de services ayant de tels contenus, a indiqué la délégation.
La délégation a répondu à d’autres questions des membres du Comité portant sur la prévention du suicide et desautomutilations parmi les jeunes. Les enfants des communautés rom et traveller sont considérés, à cet égard, comme prioritaires, a précisé la délégation. L’exclusion sociale explique en grande partie que ces enfants ont des besoins spéciaux en matière de santé, ce qui fait l’objet d’une politique de santé publique, a-t-elle expliqué.
Le Gouvernement applique d’ores et déjà une stratégie d’inclusion des enfants roms et travellers, mais cette stratégie ne s’accompagne pas d’un budget spécifique, a par ailleurs souligné la délégation, avant de faire notamment valoir que des aides sont accordées aux Travellers pour améliorer leur logement.
Le Médiateur des enfants a enquêté sur les conditions de vie d’enfants travellers et a constaté des lacunes dans leur accès aux services publics, a également déclaré la délégation. Sur cette base, le Médiateur a émis des recommandations dont l’application par les municipalités a d’ores et déjà entraîné des améliorations, même si des progrès doivent encore être faits, a-t-elle indiqué.
Le Ministère de l’éducation fournit des aides pour aider les membres de minorités, y compris les enfants travellers, à atteindre leur plein potentiel scolaire, a par ailleurs fait valoir la délégation. En outre, un projet pilote a été lancé en 2019 pour lever les barrières à la scolarisation des enfants travellers.
Le Gouvernement met l’accent sur la réduction de la pauvreté des enfants non seulement par le biais de transferts sociaux mais aussi par une meilleure coordination des services publics, a d’autre part fait savoir la délégation. Une nouvelle structure interministérielle sera bientôt chargée de veiller au bien-être des enfants dans tout le pays, a-t-elle ajouté.
Quelque 6000 enfants sont placés en Irlande, a par ailleurs indiqué la délégation. La famille d’accueil est la modalité préférée de prise en charge pour ces enfants et un travail est en cours pour recruter de nouvelles familles d’accueil et mieux les soutenir. Il est possible de placer volontairement des enfants dans des familles d’accueil, avec le consentement des parents. Les enfants qui quittent le système de protection font l’objet d’un suivi par les autorités, a souligné la délégation.
Les conditions de prise en charge des enfants handicapés dans les centres d’accueil sont contrôlées tous les trois ans, a ajouté la délégation.
La délégation a par ailleurs fait état de l’existence d’une étude sur les cas de discrimination signalés par des enfants de 8 à 12 ans anciennement placés en institution.
L’État doit faire davantage s’agissant du respect des droits des personnes handicapées, a d’autre part admis la délégation. S’il n’est pas encore envisagé de mettre à jour la loi sur les personnes handicapées, l’Irlande n’en est pas moins en train d’élaborer un programme pour les personnes ayant besoin d’une attention particulière, qui traite en particulier de la scolarisation primaire et secondaire des enfants handicapés. Leurs besoins n’étant pas suffisamment pris en compte dans les écoles, l’Irlande a créé des établissements pouvant y répondre, a insisté la délégation.
Faute de personnels suffisants, beaucoup d’enfants handicapés ne reçoivent pas à temps les services de soutien dont ils ont besoin, a poursuivi la délégation. Le Gouvernement a donc pour priorité de recruter de nouveaux personnels, a-t-elle indiqué. La pandémie de COVID-19 ayant allongé les temps d’attente pour l’évaluation des besoins des personnes handicapées, le Gouvernement a dégagé des financements et des personnels supplémentaires. Ces efforts ont déjà permis d’enregistrer une réduction des temps d’attente de 66% et d’autres progrès ont été faits dans l’accès aux services de santé, a affirmé la délégation.
S’agissant des questions de santé, il a notamment été indiqué que le Gouvernement irlandais appliquait une stratégie d’intégration des personnes intersexes. Les familles sont consultées dans les cas où des enfants doivent subir des interventions chirurgicales et les autorités estiment aussi nécessaire d’écouter les enfants concernés, quel que soit leur âge, et de les inclure dans les décisions qui les affectent.
D’autre part, le Gouvernement irlandais a lancé un programme de réduction des temps et listes d’attente pour l’accès aux services de santé généraux. Cet effort s’est traduit, en particulier, par une amélioration de l’accès aux soins par les enfants de moins de 6 ans, a fait valoir la délégation.
La part de budget consacrée à la santé mentale a augmenté depuis 2021, a par ailleurs indiqué la délégation. Le Gouvernement a investi dans la qualité des services fournis et, ici encore, dans la réduction des temps d’attente. Les enfants ayant des besoins de santé mentale sont considérés comme prioritaires et leur prise en charge est assurée dans les trois jours, a assuré la délégation. Les services déploient des équipes spécialisées en santé mentale dont l’efficacité a contribué à une amélioration réellement perceptible de la situation, a-t-elle insisté.
Le Gouvernement entend par ailleurs réduire le taux d’alcoolisme au niveau national et remédier ainsi, notamment, à ses effets néfastes sur la santé des femmes enceintes et des mineurs, a d’autre part indiqué la délégation en réponse à la question d’une experte. Les autorités ont par exemple imposé des prix minima pour les boissons alcoolisées, ainsi que des restrictions s’agissant des points de vente.
En outre, une loi adoptée l’an dernier contient plusieurs objectifs concernant l’amélioration de la santé des Travellers.
En ce qui concerne les questions d’éducation, la délégation a notamment fait savoir que chaque école devait dispenser des cours d’éducation sexuelle correspondant au programme et que les critères d’admission pour chaque école devaient être rendus publics.
Des experts du Comité ayant fait remarquer que l’Irlande était un pays de destination pour la traite des êtres humains, la délégation a indiqué que le Gouvernement était en train de renforcer la détection et la prise en charge des victimes, et qu’il envisageait d’octroyer à certaines organisations non gouvernementales une compétence quasi judiciaire pour l’aider à lutter contre ce problème.
Depuis 2016, a souligné la délégation, le Gouvernement a beaucoup investi dans la collecte de données relatives aux effets, sur les enfants concernés, des lois et des budgets adoptés. En l’état, des données concernant les problèmes de logement des Travellers et des Roms ont déjà été recueillies, a-t-elle précisé. Davantage de données ventilées devront être collectées concernant les groupes désavantagés, a ajouté la délégation.
La délégation a par ailleurs rappelé qu’un cadre national de participation des enfants avait été adopté en 2021. Les enfants sont systématiquement informés des effets concrets des consultations que les autorités organisent avec eux à travers le pays, a-t-elle assuré.
La délégation a d’autre part affirmé que 95% des engagements pris dans le cadre du dernier Plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme avaient été atteints. Un deuxième plan est à l’étude avec des représentants d’entreprises et d’organisations de la société civile ; le Gouvernement veillera à mieux inclure les enfants dans ce processus, a indiqué la délégation.
La Loi de 2005 sur la sécurité au travail et ses règlements d’application sont conformes aux normes européennes en la matière, s’agissant par exemple de la sécurité des mineurs employés dans l’industrie de la pêche, a par ailleurs déclaré la délégation.
La délégation a ensuite indiqué que, selon la loi irlandaise, le recrutement de mineurs de moins de 15 ans est déjà considéré comme un crime de guerre. Une réflexion est en cours concernant l’incrimination du recrutement de mineurs de plus de 15 ans.
L’Irlande poursuit devant la justice pénale et emprisonne moins de mineurs que la moyenne des pays membres du Conseil de l’Europe, a fait observer la délégation. Quelque 150 mineurs aboutissent chaque année dans des centres de détention pour mineurs – centres qui s’apparentent plutôt à des écoles, a-t-elle précisé.
Malgré la crise du logement en Irlande, les familles avec enfant(s) qui demandent l’asile obtiennent un logement, a par ailleurs affirmé la délégation.
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