Fil d'Ariane
LA BOSNIE-HERZÉGOVINE A PRIS DE BONNES INITIATIVES, MAIS ELLES NE SONT PAS APPLIQUÉES DANS LA PRATIQUE, DÉPLORE LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT
La Bosnie-Herzégovine a pris de bonnes initiatives – notamment dans le domaine de la petite enfance ou de la justice pour mineurs – mais elles ne sont, malheureusement, pas appliquées dans la pratique. Tel est le constat dressé par l’un des quatre corapporteurs du Comité des droits de l'enfant chargés de l’examen du rapport soumis par le pays au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant, alors que les dix-huit experts du Comité se penchaient, hier après-midi et ce matin, sur ce rapport.
L’un des corapporteurs ayant souhaité savoir si la Bosnie-Herzégovine envisageait l’adoption d’une loi générale sur les droits de l’enfant qui s’appliquerait sur tout le territoire de Bosnie-Herzégovine, la délégation bosnienne a indiqué que des efforts avaient bien été déployés pour obtenir le feu vert du Gouvernement à la rédaction d’une telle loi, mais en vain. Cette question reste donc en suspens et il n’est pas possible pour le moment de dire si le Gouvernement changera d’avis à ce sujet, a-t-elle précisé.
Plusieurs membres du Comité ayant en outre encouragé la Bosnie-Herzégovine à réfléchir à une interdiction explicite et complète des châtiments corporels, la délégation a répondu que si le cadre légal n’interdit pas explicitement de tels châtiments, la loi interdit cependant les abus et la négligence visant les enfants.
La délégation ayant également été interpellée sur le sort des enfants bosniaques partis combattre en Syrie et en Iraq, elle a assuré qu’aucun mineur bosnien participant aux conflits en Syrie et en Iraq n’avait été recensé jusqu’en 2017. La délégation a en revanche indiqué que les enfants nés dans ces pays de parents bosniens participant à ces conflits bénéficient des services d’une unité d’orientation créée à leur intention.
Une experte du Comité s’est inquiétée que selon certains textes de lois en vigueur dans le pays, il soit toujours possible de se marier entre 16 et 18 ans. Cette même experte – l’une des quatre corapporteurs chargés de l’examen du rapport bosnien – a relevé qu’un tiers des enfants en Bosnie-Herzégovine devaient quitter leur famille pour des raisons économiques et a demandé ce que l’État bosnien envisageait de faire pour apporter un soutien efficace aux familles et aux enfants en situation de vulnérabilité. Cette experte a en outre relevé que les centres de services sociaux sont le parent pauvre des institutions publiques et que beaucoup de retards ont été enregistrés dans l’obtention des allocations sociales.
La Bosnie-Herzégovine a le plus grand mal à mettre en œuvre le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, a pour sa part fait observer une autre corapporteuse.
Une experte a quant à elle déploré la stigmatisation dont les enfants handicapés sont toujours victimes en classe.
Présentant le rapport de son pays, la cheffe de la délégation, Mme Saliha Džuderija, Ministre adjointe des droits de l’homme et des réfugiés de la Bosnie-Herzégovine, a rappelé que la Bosnie-Herzégovine est un État décentralisé et que les deux entités de la Fédération de Bosnie-Herzégovine et de la Republika Srpska ainsi que le district de Brcko sont responsables de la mise en œuvre sur leurs territoires respectifs des obligations découlant de la Convention et des Protocoles facultatifs.
Mme Džuderija a ensuite rendu compte des activités menées dans le cadre du Plan d’action pour les enfants et sous la houlette du Conseil pour les enfants. La Bosnie-Herzégovine a travaillé sans relâche à l’amélioration de la protection de l’enfance, mais il est clair que tous les niveaux de gouvernement concernés devront encore faire face à de nombreux défis dans le futur. Les principaux défis consistent à renforcer le financement, à mieux prendre en compte les besoins des enfants et de leurs familles et à mettre en place un meilleur système de coordination, de collecte et d'analyse des informations sur les besoins des enfants, a-t-elle précisé.
La délégation était également composée, entre autres, de Mme Nermina Kapetanovic, Représentante permanente de la Bosnie-Herzégovine auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de nombreux fonctionnaires des Ministères des affaires étrangères; des droits de l’homme et des réfugiés; de la justice; des affaires civiles; de la sécurité; de l’éducation; de la santé; et du travail. Le Gouvernement du district de Brcko était également représenté.
La délégation a répondu à d’autres questions et observations des membres du Comité concernant, notamment, la non-discrimination, les grossesses précoces, le placement en institutions, l’adoption, les questions d’éducation, les enfants handicapés, ou encore les migrations et l’asile.
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Bosnie-Herzégovine et les rendra publiques à la fin de la session, le 27 septembre prochain.
Le Comité entamera cet après-midi, à 15 heures, l’examen du rapport du Mozambique (CRC/C/MOZ/3-4).
Présentation du rapport
Le Comité est saisi du rapport combinant les cinquième et le sixième rapports périodiques de la Bosnie-Herzégovine (CRC/C/BIH/5-6), ainsi que des réponses apportées par le pays à une liste de points à traiter que lui avait adressée le Comité.
MME SALIHA DŽUDERIJA, Ministre adjointe des droits de l’homme et des réfugiés de la Bosnie-Herzégovine, a déclaré qu’en 1993, le pays – en ratifiant la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant – s’est engagé à mettre en œuvre les mesures requises par ces instruments.
La Ministre adjointe a rappelé que la Bosnie-Herzégovine est un État décentralisé et que les deux entités de la Fédération de Bosnie-Herzégovine et de la Republika Srpska ainsi que le district de Brcko sont responsables de la mise en œuvre sur leurs territoires respectifs des obligations découlant de la Convention et des Protocoles facultatifs.
S’agissant des progrès réalisés en Bosnie-Herzégovine, Mme Džuderija a déclaré que le Ministère des droits de l'homme et des réfugiés mène différentes activités – dans le cadre de ses activités régulières ou dans le cadre de projets spéciaux – pour promouvoir et protéger les droits des enfants dans le pays. Ces activités visent à mettre en œuvre un Plan d'action pour les enfants qui donne suite aux observations finales et aux recommandations du Comité. Pour améliorer la mise en œuvre de la Convention, le Plan d'action pour les enfants de la Bosnie-Herzégovine a été adopté en 2002, afin de renforcer la position des enfants dans ce pays. Prolongé jusqu'à la fin de 2019, ce Plan d'action a défini des objectifs prioritaires ainsi que des mesures visant à créer les meilleures conditions de vie possibles pour les enfants et leur famille, notamment pour ce qui est d’améliorer l’accès à la santé, a précisé la Ministre adjointe.
Le Conseil pour les enfants de Bosnie-Herzégovine a dirigé un grand nombre d'activités en tant qu'organe expert, interministériel, consultatif et de coordination du Conseil des Ministres. Ce Conseil pour les enfants est notamment chargé d'élaborer un projet de nouveau plan d'action pour les enfants, a précisé Mme Džuderija.
S’agissant des progrès et défis dans des domaines spécifiques, la cheffe de la délégation bosnienne a souligné que la Bosnie-Herzégovine avait travaillé sans relâche à l’amélioration de la protection de l’enfance; mais, a-t-elle ajouté, il est clair que tous les niveaux de gouvernement concernés devront encore faire face à de nombreux défis dans le futur. Les principaux défis consistent à renforcer le financement, à mieux prendre en compte les besoins des enfants et de leurs familles et à mettre en place un meilleur système de coordination, de collecte et d'analyse des informations sur les besoins des enfants.
Les lois dans le domaine de la migration et de l'asile, la législation en matière de protection sociale et familiale et la lutte contre la discrimination ont été améliorées, en harmonie avec les dispositions de la Convention, a d’autre part indiqué Mme Džuderija.
La cheffe de la délégation a ensuite insisté sur les efforts conjoints déployés pour la rédaction des Principes directeurs concernant l'intérêt supérieur de l'enfant – efforts qui ont réuni les représentants les plus en vue des institutions gouvernementales, de la société civile et du monde universitaire. Les Principes directeurs proposent des mesures complètes pour que les professionnels agissent dans l’intérêt supérieur de l’enfant, a-t-elle précisé. Le pays s’emploie en permanence à créer les conditions nécessaires à la pleine mise en œuvre des droits et libertés civils des enfants et à établir des mécanismes spécifiques de protection en la matière, a ajouté la Ministre adjointe.
La législation relative aux registres d'état civil, telle que modifiée, améliore le système d'enregistrement des naissances des enfants, a par ailleurs fait valoir Mme Džuderija. La question de l'inscription des enfants roms dans ces registres est presque résolue, a-t-elle assuré.
La ratification par la Bosnie-Herzégovine du Protocole facultatif instaurant une procédure de plainte individuelle (communication) devant le Comité donne aux enfants la possibilité de déposer plainte pour violation de leur vie privée. Ce Protocole est entré en vigueur en Bosnie-Herzégovine le 17 mai 2018, a rappelé la Ministre adjointe.
Bien que le système de collecte de données sur la violence ait été considérablement amélioré en Bosnie-Herzégovine, l'enregistrement et l'utilisation de telles données posent encore de nombreux problèmes; il en va ainsi de l'incohérence des statistiques sur le nombre de victimes de la violence, étant donné que chaque institution ou chaque organisme recourt à des critères différents pour enregistrer les femmes et les enfants victimes de violence domestique, a expliqué Mme Džuderija. Les défis restent nombreux dans ce domaine en raison du manque de capacités et de ressources pour assurer toutes les formes de protection de la famille, a reconnu la cheffe de la délégation. La réforme du secteur social en est à ses débuts, même si des progrès ont d’ores et déjà été réalisés dans les domaines de la garde d'enfants et des familles d'accueil et, plus globalement, des services destinés aux enfants et aux familles.
Le placement familial d'urgence est appliqué dans les situations d'urgence lorsqu'un enfant a été abandonné par ses parents ou lorsque ses parents ne sont pas en mesure de s'occuper de lui, a ensuite précisé Mme Džuderija.
La Stratégie d'amélioration des droits et de la situation des personnes handicapées dans la Fédération de Bosnie-Herzégovine (2016-2021) et la Stratégie d'amélioration de la situation sociale des personnes handicapées en Republika Srpska 2017-2026 reprennent les recommandations du Comité, a poursuivi la Ministre adjointe. Il n’existe toujours pas de document stratégique similaire dans le district de Brcko, mais des mesures statutaires ont une portée similaire, a-t-elle ajouté.
Pour ce qui concerne l’éducation dans le pays, la Ministre adjointe a indiqué que les programmes scolaires fixent des objectifs éducatifs qui doivent permettre aux étudiants d’acquérir les connaissances, aptitudes et compétences appropriées. Des efforts sont déployés pour améliorer l'éducation des enfants, plus particulièrement des enfants roms, et garantir l'inclusion des enfants handicapés, a souligné Mme Džuderija.
Récemment, il a été difficile de soutenir les enfants migrants, a d’autre part reconnu la cheffe de la délégation; cependant avec l’aide des organisations de la société civile, un appui est fourni dans des centres d'accueil pour migrants.
En conclusion, la Ministre adjointe a souligné que la Bosnie-Herzégovine déploie des efforts considérables pour mettre en œuvre les recommandations formulées par les organismes internationaux de défense des droits de l'homme, afin de mettre pleinement en œuvre les engagements du pays.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
M. GEHAD MADI, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de la Bosnie-Herzégovine, a relevé que le pays avait pris de bonnes initiatives, notamment dans le domaine de la petite enfance ou de la justice pour mineurs mais a déploré qu’elles ne soient, malheureusement, pas appliquées dans la pratique.
Le corapporteur a demandé si l’État bosnien envisageait d’adopter une loi générale sur les droits de l’enfant qui s’appliquerait sur tout le territoire de Bosnie-Herzégovine. Il a également si le Plan d’action pour les enfants avait fait l’objet d’une évaluation, souhaitant en particulier savoir quelles parties de ce plan ont véritablement été appliquées sur le terrain.
M. Madi a par ailleurs souhaité savoir s’il existait en Bosnie-Herzégovine un mécanisme protégeant les enfants des activités délétères de certaines entreprises privées. Il a également demandé combien d’affaires avaient été ouvertes devant les tribunaux pour exploitation d’enfants obligés de s’adonner à la mendicité.
Le corapporteur s’est en outre enquis du sort des enfants bosniaques partis combattre en Syrie et en Iraq et des mesures prises pour lutter contre l’enrôlement via Internet. Quelles mesures le Gouvernement bosnien a-t-il prises pour empêcher que des mineurs ne rejoignent les conflits en Syrie ou en Iraq, a-t-il demandé ?
MME VELINA TODOROVA, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la Bosnie-Herzégovine, a expliqué que selon certains textes de lois en vigueur dans le pays, il est toujours possible de se marier entre 16 et 18 ans. Elle a demandé si des campagnes de sensibilisation avaient été organisées afin d’informer les familles quant aux effets néfastes de tels mariages précoces.
Mme Todorova a ensuite demandé ce que l’État bosnien envisageait de faire pour apporter un soutien efficace aux familles et aux enfants en situation de vulnérabilité; elle a en effet relevé qu’un tiers des enfants en Bosnie-Herzégovine devaient quitter leur famille pour des raisons économiques.
L’experte a en outre relevé que les centres de services sociaux sont le parent pauvre des institutions publiques et que beaucoup de retards ont été enregistrés dans l’obtention des allocations sociales.
Le corraporteuse a d’autre part expliqué que la qualité de l’enseignement pâtissait du morcèlement du pouvoir et s’est enquise des mesures prises pour l’améliorer. La Bosnie-Herzégovine a-t-elle pris des mesures pour moderniser l’enseignement, a-t-elle également demandé ?
MME MIKIKO OTANI, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la Bosnie-Herzégovine, s’est enquise des activités de sensibilisation menées autour des discriminations qui touchent les enfants. Qu’en est-il des réparations prévues pour les enfants victimes de discrimination et ces enfants savent-ils qu’en cas de manquement (de ce point de vue, à leur égard), ils peuvent se plaindre ?
Mme Otani a relevé que la Bosnie-Herzégovine avait le plus grand mal à mettre en œuvre le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et les mesures prises pour relever ce défi. L’experte s’est enquise de la suite donnée à la recommandation du Conseil de l’enfance d’interdire le châtiment corporel dans tous les contextes.
La corapporteuse s’est également enquise de la manière dont la Bosnie-Herzégovine appréhende les disparités en matière de protection de l’enfance dans le pays, d’une région à l’autre, ainsi que des mesures prises pour lutter contre le harcèlement sur Internet.
Quel mécanisme permet, en toute sécurité pour les enfants, de dénoncer des cas de violences sexuelles à leur encontre, a par ailleurs demandé Mme Otani ? Elle a souhaité en savoir davantage sur le Conseil de lutte contre la violence sexuelle créé récemment.
M. JOSÉ ÁNGEL RODRÍGUEZ REYES, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de la Bosnie-Herzégovine, a demandé si le nouveau système d’enregistrement des naissances avait porté ses fruits, notamment dans les zones rurales. Il a en outre souhaité savoir si la Bosnie-Herzégovine envisageait de ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention des cas d’apatridie.
L’expert a par ailleurs demandé quel rôle jouaient les médias dans la sensibilisation aux droits de l’enfant.
M. Rodríguez Reyes a ensuite demandé comment l’État envisageait de s’y prendre pour réduire les disparités entre les personnes handicapées et le reste de la population sur l’ensemble du territoire. Il s’est enquis du mécanisme de compilation de données s’agissant des enfants handicapés. Il a en outre souhaité savoir si un calendrier avait été fixé pour la mise en place d’un système d’éducation inclusive.
Un autre membre du Comité s’est enquis des mesures prises au niveau législatif pour prévenir la vente et la consommation de stupéfiants par des adolescents, de même que pour prévenir les grossesses précoces et les maladies sexuellement transmissibles chez les jeunes.
Une experte a recommandé à la Bosnie-Herzégovine de ne pas négliger l’importance du droit des enfants de jouer et de pouvoir profiter d’activités culturelles.
La même experte a regretté que certains enfants handicapés ne puissent être scolarisés que très loin de leur famille, avec le risque qu’ils abandonnent alors l’école. Elle a aussi déploré la stigmatisation dont ces enfants sont toujours victimes en classe.
Un autre expert a voulu savoir si des entreprises médiatiques avaient déjà été sanctionnées pour non-respect du droit à la vie privée de personnes mineures.
Réponses de la délégation
La délégation a indiqué que des efforts avaient bien été déployés pour obtenir le feu vert du Gouvernement à la rédaction d’une loi complète sur les droits des enfants, mais en vain. Cette question reste donc en suspens et il n’est pas possible pour le moment de dire si le Gouvernement changera d’avis à ce sujet, a-t-elle précisé.
La plupart des stratégies spécifiées dans le rapport ont été mises en œuvre, a ensuite assuré la délégation. Le Plan d’action pour les enfants comprend 127 actions et mesures directement liées aux recommandations du Comité et seulement 57% de ces actions et mesures ont été mises en œuvre, a précisé la délégation. Le pays et les entités qui le composent manquent de ressources pour une mise en œuvre complète de toutes ces mesures, a-t-elle expliqué. Le succès de la mise en œuvre des mesures dépend dans une certaine mesure des ressources financières disponibles, a-t-elle insisté.
Le Gouvernement collecte des informations sur les politiques sociales et de santé dans tout le pays afin de surveiller le succès de la mise en œuvre de la Convention, a ajouté la délégation.
Certains parlements d’enfants ont participé à l’élaboration des politiques en matière des droits de l’enfant. De toutes les manières possibles, les enfants ont été impliqués dans la mise en œuvre de la Convention, a en outre assuré la délégation.
Tous les enfants à l’étranger qui ont la nationalité de Bosnie-Herzégovine peuvent trouver protection auprès des consulats de Bosnie-Herzégovine à l’étranger, a par ailleurs rappelé la délégation.
Le Gouvernement bosnien est confronté à des problèmes avec les migrants qui ne fournissent pas d'information précise s’agissant de leur identité, a ensuite souligné la délégation.
La Bosnie-Herzégovine a adopté en 2016 une loi sur l’asile aux termes de laquelle les autorités donnent la priorité aux requérants « dont les demandes sont limitées », aux mineurs non accompagnés et aux personnes victimes de violences ou particulièrement vulnérables, a fait savoir la délégation. Les requérants bénéficient des soins de santé primaires, a-t-elle fait valoir.
La délégation a indiqué que la Bosnie-Herzégovine avait mis en œuvre la loi sur la non-discrimination, qui prévoit que le Médiateur joue un rôle central en matière de non-discrimination. Sur la base des recommandations formulées par les organes de l'Union européenne, le Gouvernement s'efforce d'aligner sa législation antidiscriminatoire sur la législation européenne en la matière.
La loi sur la non-discrimination a été modifiée; elle reprend désormais une définition de la discrimination qui inclut toute forme de discrimination fondée sur la race, le handicap, l’origine ethnique ou nationale, l’affiliation à des syndicats ou à d'autres groupes, l’identité de genre ou tout autre motif illicite. Un amendement à la loi a inversé la charge de la preuve dans les affaires de discrimination, a précisé la délégation bosnienne.
La délégation a ensuite expliqué que différentes mesures avaient été prises au niveau des cantons pour lutter contre la violence à l’école et notamment contre les violences exercées par des enseignants à l’encontre des enfants.
La délégation a ajouté que la violence entre enfants avait diminué grâce aux mesures de surveillance renforcées désormais en place dans les écoles.
D’une manière générale, des mesures de prévention des violences contre les enfants ont été mises en place par l'intermédiaire du Conseil pour les enfants et d'autres organes similaires. Des protocoles décrivent en détail les mesures à prendre en cas de violence à l'encontre d'enfants et des mécanismes sont en place pour que les personnes puissent facilement signaler des cas de violence à l'égard des enfants ou tout autre type de maltraitance, a indiqué la délégation.
Tout acte de violence contre un enfant doit obligatoirement être dénoncé aux autorités, a ensuite expliqué la délégation. Les autorités devront ensuite établir la nature du délit commis et orienter l’enfant vers une structure – au besoin une institution ou une famille d’accueil – adaptée au diagnostic. L’instance de tutelle veille à ce que la prise en charge soit correcte; elle compile en outre des données au niveau national. En 2018, 187 enfants ont été victimes de violence ou de maltraitance, a indiqué la délégation.
Les protocoles de prise en charge sont conçus pour éviter absolument que les enfants victimes de violence n’aient à revivre leur traumatisme pendant les procédures.
Une inspection dans l’institution d’accueil d’enfants gérée par l’église catholique bosnienne a mis à jour des manquements qui ont été dénoncés aux autorités, a en outre fait savoir la délégation.
La délégation a ensuite précisé que les institutions chargées de la protection et, plus généralement, de la prise en charge des enfants avaient vu leurs moyens et leurs infrastructures renforcés. Cependant, les autorités ont fait le choix d’éviter autant que possible le placement des enfants vulnérables dans des institutions fermées et de privilégier – outre les activités de prévention – le placement dans des familles d’accueil. La délégation a précisé à ce propos que la recherche des familles d’accueil se faisait avec l’aide d’organisations de la société civile.
La loi autorise toujours l’adoption d’enfants de 0 à 5 ans, a indiqué la délégation. Les autorités s’efforcent de combler les lacunes pouvant subsister dans ce domaine et de défendre l’intérêt supérieur de l’enfant dans les procédures d’adoption, a-t-elle ajouté. La Republika Srpska n’a toujours pas modifié sa loi sur l’adoption, a par ailleurs souligné la délégation.
La délégation a par ailleurs indiqué que le Gouvernement avait lancé une campagne visant à réduire le nombre de mariages impliquant des enfants. Elle a précisé que la législation en Bosnie-Herzégovine définissait un enfant comme une personne âgée de moins de 18 ans; à compter de 18 ans, l'enfant a acquis sa pleine capacité juridique. Ainsi, une personne de moins de 18 ans ne peut-elle pas contracter mariage. Toutefois, un tribunal peut approuver le mariage d'un enfant âgé de plus de 16 ans; dans ce cas, la cour sollicite généralement l’avis de professionnels, tels que des travailleurs sociaux, qui la plupart du temps ne recommandent pas le mariage des enfants, a souligné la délégation.
Les institutions concernées compilent des données concernant les enfants avec le concours des structures chargées de l’enfance, l’accès à ces données se faisant conformément aux dispositions de la loi sur la confidentialité, a ensuite indiqué la délégation. Les médias qui diffusent des informations sur un mineur sans son consentement s’exposent à des sanctions, a-t-elle ajouté.
La Bosnie-Herzégovine essaiera de se doter, avec la participation des collectivités locales, d’indicateurs plus précis concernant la situation des enfants, a poursuivi la délégation. Les autorités ont conscience des lacunes qui demeurent dans les méthodes appliquées à la collecte de données, a-t-elle indiqué, avant d’assurer que tout était mis en œuvre pour remédier à ce problème.
S’agissant des questions d’éducation, la délégation a notamment indiqué que quatre lois-cadres régissent, respectivement, l’enseignement préscolaire, primaire, secondaire et supérieur. Ces lois ont force obligatoire sur l’ensemble du territoire et doivent être appliquées par les collectivités locales. Des normes communes pour la formation des enseignants ont aussi été adoptées, de même qu’un programme scolaire unifié, a fait valoir la délégation.
Une réforme du secteur scolaire est en cours, avec l’aide de partenaires internationaux: elle vise notamment à disposer de meilleures statistiques, a poursuivi la délégation. D’autre part, des évaluations ont été faites de la qualité de l’enseignement et de la satisfaction des élèves et des enseignants. L’enseignement préscolaire est une priorité des autorités bosniennes, a fait savoir la délégation.
Aucun mineur bosnien participant aux conflits en Syrie et en Iraq n’a été recensé jusqu’en 2017, a indiqué la délégation. Les enfants nés dans ces pays de parents bosniens participant à ces conflits bénéficient des services d’une unité d’orientation créée à leur intention, a-t-elle ajouté.
L’état civil informatisé tient compte des personnes vivant en milieu rural ou reculé. Mais il est vrai que les enfants roms ne sont pas tous enregistrés, a admis la délégation: c’est pourquoi l’État bosnien propose aux parents roms l’inscription gratuite de leurs enfants.
Tous les enfants du pays ont accès aux activités culturelles et sportives, a d’autre part assuré la délégation, citant l’exemple d’un centre de loisirs encourageant la pensée créative chez les enfants au moyen d’une approche centrée sur le jeu.
La délégation a présenté la « loi spéciale sur la jeunesse » qui régit le traitement des mineurs dans le système de justice. Elle a assuré que les procédures (en justice) sont menées de manière à éviter toute nouvelle victimisation des enfants concernés.
Plusieurs membres du Comité ayant encouragé la Bosnie-Herzégovine à réfléchir à une interdiction explicite et globale des châtiments corporels, la délégation a indiqué que si le cadre légal n’interdit pas explicitement de tels châtiments, la loi interdit cependant les abus et la négligence visant les enfants – abus et négligence dont les responsables sont poursuivis en justice, a-t-elle assuré. La délégation n’en a pas moins admis que « la norme pourrait être plus explicite ».
Toute personne qui force une personne handicapée à mendier est passible d’une amende, a par ailleurs indiqué la délégation.
Une experte du Comité s’étant enquise des recours disponibles en cas de licenciement d’une jeune mère par son employeur, la délégation a précisé que les employeurs sont tenus de verser aux jeunes mères 100% de leur salaire pendant toute la durée (légale) du congé-maternité. Les employeurs étant remboursés de ces frais par la caisse de prestations sociales, un licenciement dans ce contexte n’est pas admissible. Le système varie d’un canton à l’autre, mais il est toujours possible de déposer plainte pour obtenir, le cas échéant, des dédommagements, a ajouté la délégation.
La délégation a répondu à d’autres questions portant sur la prise en charge médicale des adolescents consommateurs de stupéfiants, d’alcool et de tabac et sur la lutte contre le décrochage scolaire.
Remarques de conclusion
MME OTANI a observé, à côté de difficultés persistantes, de nombreux progrès accomplis par la Bosnie-Herzégovine. Dans ses observations finales, le Comité désignera six domaines dans lesquels des mesures urgentes devraient être prises, a-t-elle indiqué, avant de recommander aux autorités compétentes de veiller à ce que ces observations finales soient traduites et diffusées dans les cantons.
MME DŽUDERIJA a assuré les membres du Comité de l’intention de son Gouvernement d’intégrer les recommandations qui seront adressées au pays dans le cadre législatif national et de veiller à ce que les différents niveaux de gouvernement soient dûment informés de la teneur de ces recommandations.
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