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CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT : PLUSIEURS DÉLÉGATIONS ÉVOQUENT LE RETRAIT DES ÉTATS-UNIS DU TRAITÉ FNI

Compte rendu de séance
La Conférence examine le projet de décision sur les éléments possibles d’un programme de travail préparé par son Président

La Conférence du désarmement s’est penchée, ce matin, sur le projet de décision relatif au programme de travail de la Conférence préparé par son Président, l’Ambassadeur Duong Chi Dung du Viet Nam. Elle a auparavant entendu plusieurs délégations s’exprimer au sujet du retrait des États-Unis du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI), le 2 août dernier. La situation dans la péninsule de Corée a aussi été évoquée par plusieurs délégations.

La délégation des États-Unis a donné lecture d’une déclaration du Secrétaire d’État des États-Unis, M. Michael Pompeo, indiquant que la décision du pays de se retirer du Traité FNI s’expliquait par le fait que la Fédération de Russie ait refusé d’en revenir au respect plein et vérifiable du Traité en détruisant un système de missile qui y contrevient. M. Pompeo indique, dans son discours, que le Président Trump a demandé à son administration d’ouvrir un nouveau chapitre en cherchant une nouvelle ère de contrôle des armements qui dépasse les traités bilatéraux du passé, invitant la Fédération de Russie et la Chine à rejoindre les États-Unis dans cette démarche.

Ce matin, en réponse à cette déclaration des États-Unis, la délégation de la Fédération de Russie a nié être responsable de la sortie des États-Unis du Traité FNI. Pour sa part, la Chine a indiqué qu’elle ne participerait pas à des processus de désarmement et de contrôle des armements avec les États-Unis et la Fédération de Russie, car son propre arsenal ne menace ni la paix, ni la sécurité internationale.

S’agissant de la situation dans la péninsule de Corée, la République populaire démocratique de Corée a déclaré que les exercices militaires, hostiles par nature, engagés en ce moment par la République de Corée et les États-Unis sont incompatibles avec le dialogue et l’amélioration des relations bilatérales. Les États-Unis ont, pour leur part, assuré qu’ils étaient réellement attachés à la dénucléarisation de la péninsule de Corée, comme cela avait été discuté entre les dirigeants des deux pays (États-Unis et République populaire démocratique de Corée) à Singapour. La République de Corée a quant à elle affirmé qu’elle comptait sur une reprise du dialogue avec la République populaire démocratique de Corée et sur l’application par cette dernière des accords pertinents.

S’agissant de son « projet de décision sur des éléments possibles d’un programme de travail » de la Conférence (CD/WP.621/Rev.1), le Président de la Conférence a indiqué qu’il clarifiait le rôle de la présidence dans le travail des organes subsidiaires dont se doterait la Conférence et dans la désignation des coordonnateurs. Les Pays-Bas ont, pour leur part, présenté un document intitulé « Revenir aux fondamentaux », proposé en tant que programme de travail pour la Conférence. Les délégations ont ensuite débattu de ces deux textes en séance informelle.

Ce matin, le Président de la Conférence, ainsi que les délégations de la Fédération de Russie et de la Chine ont présenté leurs condoléances aux victimes des deux massacres commis ce week-end aux États-Unis.

À l’ouverture de la séance, le Président de la Conférence a en outre indiqué qu’il avait informé le Secrétaire général des Nations Unies de ce que les membres de la Conférence approuvaient la nomination (par M. Guterres) de Mme Tatiana Valovaya, nouvelle Directrice de l’Office des Nations Unies à Genève, en tant que Secrétaire générale de la Conférence.

Les délégations suivantes ont fait des déclarations au cours de la partie publique de la séance : États-Unis, République populaire démocratique de Corée, Pays-Bas, Fédération de Russie, Chine, Ukraine et République de Corée.


La prochaine séance publique de la Conférence aura lieu jeudi 8 août, à 10 heures. Elle sera consacrée à la question de la prévention de la guerre nucléaire.


Aperçu des déclarations

La délégation des États-Unis a donné lecture d’une déclaration du Secrétaire d’État des États-Unis au sujet du retrait des États-Unis du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI).

Dans cette déclaration, prononcée le 2 août dernier, M. MICHAEL POMPEO indique que le retrait des États-Unis, conforme à l’article XV du Traité, s’explique par le fait que la Fédération de Russie ait refusé d’en revenir au respect plein et vérifiable du Traité en détruisant son système de missile de croisière de portée intermédiaire basé à terre – SSC-8 ou 9M729 –, qui contrevient au Traité. Depuis le milieu des années 2000 au moins, la Fédération de Russie a élaboré, produit et testé en vol ce missile, avant d’en déployer plusieurs bataillons. Les États-Unis ont fait part de leurs préoccupations à la Fédération de Russie en 2013 : mais la Fédération de Russie a refusé systématiquement, pendant six ans, les efforts des États-Unis visant le retour de la Fédération de Russie au respect du Traité, regrette M. Pompeo dans son discours.

Or, les États-Unis refusent de rester liés par un traité qui est délibérément bafoué par la Fédération de Russie, poursuit M. Pompeo. Le non-respect du Traité FNI par la Fédération de Russie menace les intérêts suprêmes des États-Unis, tandis que le développement et le déploiement d’un système de missiles en violation du Traité constituent une menace directe contre les États-Unis et leurs alliés et partenaires. Les États-Unis apprécient grandement la coopération et la résolution de leurs alliés de l’OTAN face aux violations commises par la Fédération de Russie, souligne en outre le Secrétaire d’État dans son discours.

M. Pompeo indique pour conclure que le Président Trump a demandé à son administration d’ouvrir un nouveau chapitre en cherchant une nouvelle ère de contrôle des armements qui dépasse les traités bilatéraux du passé. Pour l’avenir, les États-Unis appellent la Fédération de Russie et la Chine à « les rejoindre pour obtenir de vrais résultats de sécurité pour leurs pays et pour le monde entier ».

La République populaire démocratique de Corée a déploré que les États-Unis et la République de Corée aient lancé récemment de nouvelles manœuvres militaires conjointes agressives et menaçantes. Elle a en outre déploré le déploiement par les États-Unis, en République de Corée, de nouveaux matériels militaires, malgré les engagements pris au sommet de Singapour. La délégation de la République populaire démocratique de Corée a condamné le fait que les États-Unis aient accusé son pays d’être un « État voyou » et de disséminer des technologies nucléaires ; elle a également dénoncé d’autres manouvres offensives des États-Unis qui montrent que leur position à l’égard de la République populaire démocratique de Corée n’a pas changé.

La délégation a ensuite rappelé qu’aucune loi n’obligeait la République populaire démocratique de Corée à respecter ses engagements alors que les autres parties ne respectent pas les leurs. Le dialogue constructif est impossible dès lors que des jeux de guerre sont en cours contre un des deux interlocuteurs, a insisté la délégation de la République populaire démocratique de Corée.

Les Pays-Bas ont, pour leur part, présenté un document intitulé « Revenir aux fondamentaux », proposé en tant que programme de travail pour la Conférence. Ce document soutient que la Conférence devrait organiser ses travaux sur la base du Règlement intérieur des cinquante premières années d’activités de la Conférence. En particulier, le lien entre la création des organes subsidiaires et la programme de travail n’est pas établi dans ce Règlement intérieur, les organes étant considérés comme facultatifs. Pendant les séances plénières, ont recommandé les Pays-Bas, la Conférence devrait se concentrer sur les questions de fond, avant de créer des organes subsidiaires. Cette approche a fait ses preuves par le passé, a insisté la délégation néerlandaise.

La Fédération de Russie a dit appuyer la méthode choisie par le Président de la Conférence pour guider les consultations sur son projet de programme de travail. Elle a jugé utile que la Conférence se penche maintenant sur des éléments qui pourraient servir à la présidence suivante.

S’agissant du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI), la Fédération de Russie a jugé infondées les accusations la visant selon lesquelles elle serait responsable de la sortie des États-Unis de ce Traité et de la fin de cet instrument. La délégation russe a indiqué que son pays avait déjà expliqué le déroulement réel des faits relatifs à cet accord.

Les efforts des États-Unis pour saper les instruments de contrôle des armements et de désarmement nucléaire sont évidents et ne datent pas d’hier, a ajouté la Fédération de Russie. En effet, a-t-elle précisé, c’est en 1999 que les États-Unis ont violé pour la première fois le Traité FNI en utilisant des avions sans pilote interdits par ce Traité. La délégation russe a par ailleurs condamné la campagne de diffamation menée par les États-Unis à l’encontre de la Fédération de Russie pour faire croire que cette dernière ne respectait pas le Traité FNI.

Les États-Unis ouvrent une nouvelle course aux armements dans le domaine des missiles nucléaires, a ensuite mis en garde la délégation russe, en voulant pour preuve les déclarations récentes de hauts responsables américains selon lesquelles les États-Unis non seulement sortent du Traité FNI, mais n’entendent pas non plus prolonger le dernier traité de désarmement nucléaire en vigueur entre les deux pays. La délégation russe a relevé que la décision des États-Unis a pris effet à la veille du 6 août, date anniversaire du bombardement d’Hiroshima, ce qui – a estimé la délégation – reflète les intentions réelles des États-Unis.

Répondant à la République populaire démocratique de Corée, les États-Unis ont assuré qu’ils étaient réellement attachés à la dénucléarisation de la péninsule de Corée, comme cela avait été discuté entre les dirigeants des deux pays à Singapour.

La Chine a regretté et condamné le retrait des États-Unis du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, et le fait que des fonctionnaires de ce pays aient indiqué, après le 2 août, vouloir désormais développer des missiles à courte et moyenne portée, en violation des engagements internationaux des États-Unis et pour obtenir un avantage stratégique. La façon d’agir des États-Unis, marquée par l’unilatéralisme, menace la paix et la sécurité dans plusieurs régions, a déploré la Chine.

La Chine a insisté sur le fait qu’elle ne participerait pas à des processus de désarmement et de contrôle des armements avec les États-Unis et la Fédération de Russie, car son propre arsenal, très limité, ne menace ni la paix, ni la sécurité internationale. La Chine ne s’engagera pas dans une course aux armements avec d’autre pays, a ajouté la délégation chinoise. Les différends entre la Fédération de Russie et les États-Unis s’agissant du respect des traités devraient être résolus par la négociation, a-t-elle recommandé.

L’Ukraine s’est dite déçue par la fin du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire du fait des actes de la Fédération de Russie et a souligné que l’Ukraine avait elle-même respecté scrupuleusement les termes de ce Traité plus que trentenaire. La délégation ukrainienne a ensuite dénoncé le déploiement de missiles russes à courte portée menaçant plusieurs capitales européennes, de même que l’utilisation de ces missiles Iskander lors de manœuvres militaires en Crimée, en mars dernier.

Les États-Unis ont affirmé que la Fédération de Russie et la Chine avaient renforcé leurs arsenaux nucléaires et donné une plus grande place aux armes nucléaires dans leurs doctrines nucléaires depuis dix ans, alors même que les États-Unis ont, eux, fait le contraire. C’est pourquoi les États-Unis appellent à un élargissement à la Chine des discussions sur les armements nucléaires stratégiques. Il est d’une importance critique d’entrer dans une nouvelle ère de contrôle, alors même que certains pays intimident des alliés des États-Unis et que la Chine militarise des îles dans la mer de Chine, a insisté la délégation des États-Unis.

Toutes les parties aux traités doivent les respecter, ont ensuite rappelé les États-Unis. Ils ont regretté qu’après plus de trente rencontres avec la Fédération de Russie, ce pays ait refusé d’admettre qu’il ne respectait pas le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire. La délégation des États-Unis a réitéré le souhait de son pays d’intégrer la Chine au dialogue sur les armes nucléaires.

La Chine a nié avoir renforcé son arsenal nucléaire. La puissance qui accuse la Chine de militariser la mer de Chine méridionale possède elle-même des centaines de bases militaires partout dans le monde, a rappelé la délégation chinoise. Les dispositifs de la Chine ne sont pas dirigés contre un pays particulier, a-t-elle assuré : la Chine ne s’en prend qu’à la mentalité de guerre froide qui menace la paix et la stabilité internationales et elle appelle toutes les parties à chercher des terrains d’entente par la voie du dialogue, notamment au sein de la Conférence du désarmement et entre puissances nucléaires siégeant au Conseil de sécurité.

La République de Corée a déclaré que, s’agissant de la situation dans la péninsule de Corée, l’important était d’amoindrir les tensions et d’instaurer une paix durable. C’est pourquoi le Gouvernement de la République de Corée compte sur une reprise du dialogue avec la République populaire démocratique de Corée et sur l’application par cette dernière des accords pertinents.

La République populaire démocratique de Corée a déclaré que si la République de Corée voulait vraiment rétablir la paix et la prospérité dans la péninsule de Corée, elle reviendrait à ses intentions originales telles qu’exprimées lors des sommets organisés l’an dernier et s’acquitterait des obligations qu’elle a prises dans ce contexte. La délégation de la République populaire démocratique de Corée a ajouté que les exercices militaires, hostiles par nature, sont incompatibles avec le dialogue et l’amélioration des relations bilatérales.


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DC19.038/F