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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT DÉBAT DES NOUVEAUX SYSTÈMES D’ARMES DE DESTRUCTION MASSIVE, D’UN PROGRAMME GLOBAL DE DÉSARMEMENT ET DE LA TRANSPARENCE DANS LE DOMAINE DES ARMEMENTS

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement a tenu cet après-midi un débat portant sur les points 5, 6 et 7 de son ordre du jour, intitulés, respectivement, « nouveaux types et systèmes d’armes de destruction massive ; armes radiologiques », « programme global de désarmement » et « transparence dans le domaine des armements ».

Dans des remarques liminaires, le Président de la Conférence, l’Ambassadeur Jorge Valero de la République bolivarienne du Venezuela, a présenté les deux panélistes du débat : M. Yury Ambrazevich, Représentant permanent de la République du Bélarus auprès des Nations Unies à Genève, et Mme Kerstin Vignard, Directrice adjointe de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR).

M. Ambrazevich a axé son intervention sur les risques liés au développement des sciences et des techniques, de même que sur la manière d’empêcher l’acquisition d’armes de destruction massive par des acteurs non étatiques. Il a notamment proposé que la Conférence étudie des mesures nationales pour éviter que des acteurs non étatiques acquièrent des armes de destruction massive ; et qu’elle prie le Secrétaire général de préparer un rapport complet sur les risques posés, pour la sécurité mondiale et pour la non-prolifération, par l’utilisation des nouvelles technologies.

Pour sa part, Mme Vignard a décrit des initiatives qui donneront à la communauté internationale l'occasion de renforcer et d'opérationnaliser les normes, règles et principes relatifs à un comportement responsable dans le cyberespace, de même que de contribuer au règlement pacifique des cyberconflits. Mme Vignard a souligné que des villes entières ont subi des attaques informatiques et des ingérences numériques, et que des attaques massives ont frappé le secteur financier de certains pays : elle a jugé préoccupants l'affaiblissement des normes établies et la compréhension de la manière dont le droit international s'applique à ces problèmes.

À la suite des présentations des deux panélistes, la Conférence a discuté de manière informelle des questions liées au point 5, 6 et 7 de l’ordre du jour.

La République islamique d’Iran a ensuite prononcé une déclaration générale au nom du Groupe des 21. Elle a notamment appelé la Conférence à entamer des négociations sur un programme progressif visant l’élimination complète des armes nucléaires, y compris une convention interdisant la possession, le développement, la production, le stockage et le transfert d’armes nucléaires, en vue de l’élimination complète et vérifiable de ces armes, selon un calendrier défini.


Le Président a annoncé que la prochaine réunion publique de la Conférence, demain jeudi 13 juin, à 10 heures, porterait sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique et sur sa proposition de programme de travail révisée (CD/WP.620/Rev.1).

Débat thématique

M. JORGE VALERO, Président de la Conférence du désarmement et Représentant permanent de la République bolivarienne du Venezuela auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a déclaré qu'il s'agirait d'une session thématique relative aux points 5, 6 et 7 de l'ordre du jour de la Conférence. Dans ce contexte, deux intervenants feront des exposés suivis d'un débat informel.

Exposés des panélistes

M. YURY AMBRAZEVICH, Représentant permanent de la République du Bélarus auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que, l’année dernière, l’organe subsidiaire 5 avait abordé un certain nombre de questions importantes et transversales liées aux nouvelles sciences et techniques, de même qu’au risque d’acquisition de nouvelles armes de destruction massive. La cybersécurité, l’« arsenalisation » de l’intelligence artificielle, la prolifération des armes de destruction massive parmi des acteurs non étatiques, le désarmement général et complet, le renforcement des mesures de confiance ont aussi été abordés. La biologie synthétique, les cybermenaces et les systèmes d’armes autonomes – notamment – sont autant de menaces qui ont été évoquées au sein de l’organe subsidiaire de même qu’à la Conférence, a insisté M. Ambrazevich.

Le débat a montré que les États membres ont des approches différentes sur la manière d’aborder ces questions et sur le rôle de la Conférence dans ce processus, a relevé M. Ambrazevich : en revanche, personne n’a mis en doute la nécessité d’évaluer les risques liés au développement des sciences et des techniques. D’autre part, la nécessité de renforcer le niveau de responsabilité des chercheurs, de même que la recherche d’un équilibre entre la recherche scientifique à des fins pacifiques et le fait de ne pas admettre l’utilisation néfaste des technologies, ont été au centre des discussions.

Ancien coordonnateur de l’organe subsidiaire 5, le Bélarus estime que la Conférence devrait se concentrer sur la manière d’empêcher que les nouvelles sciences et techniques soient utilisées à des fins destructrices. Le Bélarus considère aussi que le moment est venu de mettre fin à la pratique consistant à séparer les questions à l’ordre du jour de la Conférence, entre les questions-clés et les autres. Les défis examinés au titre des points 5, 6 et 7 doivent être examinés au même titre que le désarmement nucléaire, la non-prolifération, les garanties de sécurité négatives et la prévention d’une course aux armements dans l’espace, a estimé le représentant bélarussien.

Les mesures préventives que la Conférence peut adopter face à ces menaces sont une contribution importante à la non-prolifération et au renforcement de la sécurité internationale, a ajouté M. Ambrazevich. De même, les mesures de transparence et de confiance doivent permettre d’apaiser la tension et d’arriver à une nouvelle détente que beaucoup appellent de leurs vœux. M. Ambrazevich a suggéré de créer un mécanisme pour suivre l’influence des sciences et des techniques sur la sécurité.

De nombreux chercheurs affirment que les technologies de l’intelligence artificielle peuvent engendrer une « arme de destruction massive absolue », a poursuivi le représentant bélarussien. La Conférence peut donc examiner la question de l’intelligence artificielle du point de vue des risques inacceptables pour la sécurité mondiale et de la manière d’empêcher l’acquisition d’armes de destruction massive par des acteurs non étatiques. Une telle contribution servirait tant la cause de la non-prolifération que la lutte antiterroriste, a fait remarquer M. Ambrazevich.

En particulier, l’élaboration de règles univoques doit empêcher que des armes chimiques et biologiques ne tombent dans les mains d’acteurs non étatiques en cas de conflit : un accord sur de telles normes au sein de la Conférence serait une contribution importante au Conseil de sécurité et à l’Assemblée générale, a fait valoir M. Ambrazevich. Le Bélarus propose aussi que la Conférence étudie des mesures nationales pour éviter que des acteurs non étatiques acquièrent des armes de destruction massive ; et qu’elle prie le Secrétaire général de préparer un rapport complet sur les risques posés, pour la sécurité mondiale et pour la non-prolifération, par l’utilisation des nouvelles technologies.

M. Ambrazevich a, enfin, fait savoir que son pays organiserait, avec l’ONU et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, en septembre 2019 à Minsk, une conférence de haut niveau sur la lutte contre le terrorisme et sur l’utilisation des nouvelles technologies. Le débat portera notamment sur l’utilisation malintentionnée par des terroristes de l’intelligence artificielle et des nouvelles technologies.

MME KERSTIN VIGNARD, Directrice adjointe de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), a décrit plusieurs processus en cours en matière de cybersécurité et de prévention d’une course aux armements dans l’espace.

En matière de cybersécurité, la Première Commission de l’Assemblée générale en octobre dernier a entériné deux résolutions qui établissent deux processus parallèles. D’abord, la résolution 73/266 porte création d’un groupe d’experts gouvernementaux au sein duquel 25 États se rencontreront quatre fois d’ici à 2021. Deux mécanismes consultatifs sont attachés à cette résolution : ils prévoient des consultations régionales avec l’Union européenne et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, notamment ; ainsi que des consultations avec les membres des Nations Unies. Ensuite, la résolution 73/27 prévoit d’autres mécanismes de consultation avec les secteurs de l’économie, les universités et les organisations non gouvernementales. Ces deux processus donneront à la communauté internationale l'occasion de renforcer et d'opérationnaliser les normes, règles et principes relatifs à un comportement responsable dans le cyberespace ; de même que de contribuer au règlement pacifique des cyberconflits, a dit Mme Vignard.

La semaine dernière, des acteurs non étatiques intéressés ont pu prendre part aux négociations du Groupe d’experts gouvernementaux dans le domaine de la prévention de la course aux armements dans l’espace. Ce sujet ne relève pas d’un nombre limité d’États, comme le pensent certains : les événements montrent que cela n’est plus le cas. Il faut que de plus en plus d’États travaillent sur cette question. Les acteurs non étatiques ont un rôle crucial à jouer car il est impossible d’aborder la question de la vulnérabilité sans parler avec les différents secteurs de l’économie concernés.

Mme Vignard a expliqué que la difficulté était de savoir comment articuler la nature changeante des menaces. Ella a souligné que des villes entières ont subi des attaques informatiques et des ingérences numériques, et que des attaques massives ont frappé le secteur financier de certains pays : leurs auteurs ont pu ainsi voler des millions de dollars. Les choses évoluent très rapidement dans ce domaine, a-t-elle insisté. Mme Vignard a jugé préoccupants l'affaiblissement des normes établies et la compréhension de la manière dont le droit international s'applique à ces problèmes.

S’agissant de la militarisation de l’espace, Mme Vignard a expliqué qu’il faut réfléchir aux implications militaires de l’intelligence artificielle. Elle s’est dite sceptique sur la notion de « course aux armements » dans ce domaine, estimant qu’il fallait plutôt réfléchir au contrôle des applications militaires de l’intelligence artificielle. Les mesures de contrôle des armes ont pour buts de créer la stabilité, d’appliquer les principes du droit international humanitaire ou encore d’améliorer la sécurité, a relevé Mme Vignard, soulignant qu’il s’agissait là d’objectifs louables. Il faut aussi réfléchir à ce que signifient les mesures de confiance dans ce domaine, dans un monde où l’on peut produire et diffuser des contenus faux qui suscitent la méfiance : il faut prévenir l’escalade actuelle dans ce domaine, a plaidé la Directrice adjointe de l’UNIDIR.

L’Institut tiendra cet été son premier « dialogue sur l’innovation » : il se penchera sur les implications positives et les risques que posent les innovations technologiques. Ce sera l’occasion de réfléchir aux nouvelles dimensions des progrès technologiques qui ne sont pas encore abordées dans les discussions autour du désarmement, comme la blockchain et certaines applications militaires.

Les membres de la Conférence se sont ensuite réunis en séance informelle pour débattre des questions soulevées par les deux panélistes.

Déclaration générale

Au nom du Groupe des 21, la République islamique d’Iran a – notamment – réaffirmé la validité absolue de la diplomatie multilatérale dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération. Le Groupe prend note de l’adoption du Traité sur l'interdiction des armes nucléaires en 2017 et, a dit la République islamique d’Iran, réaffirme que l’élimination totale des armes nucléaires constitue la seule garantie absolue contre leur utilisation ou la menace de leur utilisation. Jusqu’à l’élimination totale de ces armes, le Groupe réaffirme la nécessité urgente d’adopter un instrument juridique international contraignant pour garantir les États non dotés d’armes nucléaires contre l’utilisation d’armes nucléaires ou la menace d’utilisation de telles armes. Le Groupe est préoccupé par le fait que malgré les engagements pris par les États dotés d’armes nucléaires, et malgré les demandes faites depuis longtemps par les États non dotés de recevoir de telles garanties, aucun progrès concret n’ait été réalisé dans ce domaine.

Le Groupe des 21 estime en outre que la pleine réalisation des conséquences catastrophiques des armes nucléaires sur la santé humaine, sur l’environnement et sur d’autres ressources économiques vitales doit sous-tendre tous les efforts, approches et engagements internationaux envers le désarmement nucléaire. Les États membres du Groupe des 21 qui sont aussi parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) saluent l’esprit des conclusions des trois conférences [sur les conséquences humanitaires du recours volontaire ou accidentel aux armes nucléaires] qui ont eu lieu à Oslo, à Mexico et à Vienne. Ils appellent tous les États dotés d’armes nucléaires qui sont parties au TNP à donner effet à leur engagement sans équivoque envers l’élimination totale de leur arsenal nucléaire en vue du désarmement nucléaire, auquel tous les États parties sont engagés au titre de l’Article VI du Traité.

Le Groupe des 21 salue d’autre part la proclamation en 2014, pour la première fois dans l’histoire, d’une zone de paix en Amérique latine et dans les Caraïbes. Il réitère l’importance de la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. Les États membres du Groupe des 21 qui sont aussi parties au TNP sont cependant déçus et très préoccupés par le fait que trois États parties, dont deux qui doivent assumer une responsabilité particulière en tant que dépositaires du Traité, aient empêché l’adoption par consensus du document final issu de la neuvième Conférence d’examen du TNP, comprenant le processus de création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. Les États membres du Groupe des 21 qui sont aussi parties au TNP réaffirment l’urgence de l’accession d’Israël au Traité et le placement de toutes ses installations nucléaires sous la sauvegarde de l’Agence internationale de l’énergie atomique.

Le Groupe réitère aussi qu’il est urgent que la Conférence remplisse son mandat tel qu’il a été défini par la Première session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée au désarmement [1978] ; et réaffirme son soutien à la tenue rapide d’une quatrième session extraordinaire sur le désarmement.

Déçu que la Conférence n’ait pas pu reprendre ses travaux de fond, le Groupe insiste sur la nécessité urgente pour elle d’entamer des négociations sur le désarmement nucléaire. À titre prioritaire, la Conférence devrait entamer des négociations sur un programme progressif visant l’élimination complète des armes nucléaires, y compris une convention interdisant la possession, le développement, la production, le stockage et le transfert d’armes nucléaires, en vue de l’élimination complète et vérifiable de ces armes, selon un calendrier défini.

Enfin, la République islamique d’Iran, toujours au nom du Groupe des 21, a souligné l’importance de poursuivre les consultations autour de la possibilité d’ouvrir la Conférence à d’autres membres. Le Groupe des 21 insiste sur l’importance d’améliorer les relations entre la société civile et la Conférence, conformément aux décisions prises par la Conférence.


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