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Au Comité des droits de l’homme, les Maldives sont félicitées pour l’adoption d’un ensemble impressionnant de nouvelles lois et sont invitées à prendre du recul sur la place qu’occupe la religion, afin d’éviter qu’elle ne fasse obstacle à certaines réformes

Compte rendu de séance

 

Le Comité des droits de l’homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport soumis par les Maldives au titre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Durant le dialogue noué avec la délégation maldivienne venue soutenir ce rapport, un expert membre du Comité a félicité le pays pour l’adoption d’un ensemble impressionnant de nouvelles lois pendant la période couverte par le rapport [2012-2022].

Un expert a souhaité savoir quel texte prévalait aux Maldives en cas de conflit entre la charia et le Pacte, et a demandé si les Maldives envisageaient de revoir leur position s’agissant de la réserve à l’article 18 du Pacte, relatif à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Cet expert a constaté des lacunes dans le système judiciaire maldivien et a dit craindre l’utilisation de la religion comme prétexte ou obstacle à certaines réformes : il a recommandé que les autorités prennent du recul sur la place qu’occupe la religion aux Maldives et s’efforcent de mettre les droits de l’homme au cœur de leurs priorités.

Il a par ailleurs été relevé que la loi de 2022 sur les preuves, apparemment controversée, pourrait violer la Constitution maldivienne en donnant aux tribunaux le pouvoir d'obliger les journalistes à révéler leurs sources.

D’autres préoccupations ont été exprimées devant des arrestations arbitraires de manifestants et un usage excessif de la force par la police. Il a été relevé que, selon la Commission des droits de l'homme des Maldives, il y a eu ces dernières années une augmentation des cas de torture commis par la police, mais très peu de poursuites par le parquet. Des questions ont aussi porté sur les conditions de détention aux Maldives, s’agissant en particulier du problème de la surpopulation carcérale.

Il a par ailleurs été relevé que les Maldives ne disposent pas d'un système d'asile ni de mécanismes de reconnaissance et de protection des réfugiés.

A d’autre part été mentionné un niveau élevé de discrimination, de stigmatisation et de marginalisation à l’encontre des personnes LGBTI aux Maldives, y compris la criminalisation des relations homosexuelles. Il a été demandé s'il était envisagé de modifier le Code pénal maldivien et la loi sur les infractions sexuelles afin de dépénaliser l'adultère et les relations extraconjugales, et s’il ne serait pas opportun pour les Maldives d’abroger l’interdiction faite aux non-musulmans de devenir des citoyens maldiviens.

Une experte a par ailleurs relevé que la corruption restait un problème aux Maldives.

Présentant le rapport de son pays, M. Ahmed Usham, Procureur général de la République des Maldives, a d’abord souligné que le nouveau Président de la République, M. Mohamed Muizzu, avait promis de trouver un juste équilibre entre le développement structurel et le développement humain. Le Procureur général a précisé que dès sa prise de mandat, le Président maldivien avait créé le Bureau des droits civils, qui est chargé de traiter les plaintes des particuliers sur les questions de discrimination et de violation des droits civils et politiques et de dialoguer avec les organisations de la société civile dans la défense de ces droits.

Depuis la soumission du rapport en 2022, les Maldives ont pris de nombreuses mesures législatives pour renforcer la protection des droits civils et politiques, a poursuivi le Procureur général, signalant en particulier la promulgation de la loi sur les associations. Des modifications ont aussi été apportées aux lois afin de garantir l'impartialité des processus électoraux ainsi que de permettre aux électeurs malvoyants de voter de manière indépendante. Enfin, la loi sur la preuve de 2022 remplace la loi obsolète qui était en vigueur depuis 1976, a ajouté le chef de la délégation maldivienne.

M. Usham a par ailleurs indiqué que grâce à l'interdiction de la peine de mort pour les mineurs, toutes les condamnations à mort prononcées contre des mineurs avaient été commuées conformément à la loi. Les politiques du Gouvernement en matière d’administration de la justice comprennent l'amélioration de l'accès à la justice dans les atolls et la création d'un tribunal des petits litiges, a-t-il en outre souligné.

La délégation maldivienne était également composée, entre autres, de Mme Salma Rasheed, Représentante permanente des Maldives auprès de l'Office des Nations unies à Genève, ainsi que de plusieurs représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de la sécurité intérieure et de la technologie, du Ministère du développement social et de la famille, du pouvoir judiciaire et du bureau du Président de la République.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport des Maldives et les publiera à l’issue de sa session, le 23 juillet.

Dans des remarques de conclusion, M. Usham a déclaré que l’échange avec le Comité avait permis aux Maldives de comprendre limites qu’impose la présence très marquée de l’islam dans la législation du pays. Les Maldives n’en restent pas moins attachées à la protection des droits civils et politiques, ce dont témoignent les dispositions constitutionnelles en vigueur et les mesures prises pour obtenir de grandes percées législatives conformément au Pacte, a insisté le Procureur général.

 

Cet après-midi, à partir de 15 heures, le Comité examinera le rapport du Suriname.

 

Examen du rapport des Maldives

Le Comité est saisi du deuxième rapport périodique des Maldives (CCPR/C/MDV/2), établi sur la base d’une liste de questions à traiter qui avait été soumise par le Comité.

Présentation

Présentant le rapport de son pays, M. AHMED USHAM, Procureur général de la République des Maldives, a d’abord souligné que le nouveau Président de la République, M. Mohamed Muizzu, lors de sa prestation de serment en novembre 2023, avait promis de trouver un juste équilibre entre le développement structurel et le développement humain. M. Usham a insisté sur la détermination du Gouvernement actuel à défendre l'État de droit et la suprématie de la Constitution, en veillant à ce qu'il n'y ait aucune ingérence dans le système judiciaire.

Le Procureur général a indiqué que dès sa prise de mandat, le Président maldivien avait créé le Bureau des droits civils chargé de traiter les plaintes des particuliers sur les questions de discrimination et de violation des droits civils et politiques, et de dialoguer avec les organisations de la société civile dans la défense de ces droits. A ce jour, 51 plaintes ont été déposées et 18 ont été résolues par ce Bureau, a précisé M. Usham. Il a en outre rappelé que son pays avait ratifié le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte [instaurant une procédure de plaintes individuelles], ainsi que la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Depuis la soumission du rapport en 2022, les Maldives ont pris de nombreuses mesures législatives pour renforcer la protection des droits civils et politiques, a poursuivi le Procureur général, signalant en particulier la promulgation de la loi sur les associations. Des modifications ont aussi été apportées aux lois afin de garantir l'impartialité des processus électoraux ainsi que de permettre aux électeurs malvoyants de voter de manière indépendante. Enfin, la loi sur la preuve de 2022 remplace la loi obsolète qui était en vigueur depuis 1976, a ajouté le chef de la délégation maldivienne.

Après avoir évoqué les priorités du Gouvernement que sont le droit au logement adéquat et l'accès à la santé, le Procureur général a indiqué que la loi sur l'égalité entre les hommes et les femmes marquait une étape importante dans les efforts du pays pour lutter contre la discrimination fondée sur le sexe. Au titre des mesures temporaires spéciales, le Gouvernement a, notamment, introduit un quota de 33% de femmes dans les conseils municipaux, a-t-il précisé.

M. Usham a ajouté que grâce à l'interdiction de la peine de mort pour les mineurs, toutes les condamnations à mort prononcées contre des mineurs avaient été commuées conformément à la loi. Les mesures prises pour réhabiliter les enfants susceptibles d'enfreindre la loi seront appliquées de manière à ce que les enfants de moins de 15 ans ne soient jamais incarcérés, a ajouté le Procureur général.

Le Procureur général a d’autre part insisté sur l’importance accordée par son pays au respect des garanties juridiques des personnes détenues et à la protection du droit à un procès équitable. Le Gouvernement a promulgué en 2020 une nouvelle loi sur les services de police, qui introduit plusieurs réformes concernant la gouvernance des services de police en mettant l'accent sur les droits de l'homme.

D’autre part, malgré la promulgation d'une loi moderne sur les prisons et la libération conditionnelle, de nombreux problèmes liés aux prisons ont persisté au fil des ans, a admis M. Usham. Des efforts sont déployés pour réduire la surpopulation carcérale, traiter la question de la détention provisoire et améliorer les conditions matérielles dans les prisons, a-t-il indiqué.

Les politiques du Gouvernement en matière d’administration de la justice comprennent notamment l'amélioration de l'accès à la justice dans les atolls et la création d'un tribunal des petits litiges, a par ailleurs indiqué M. Usham.

M. Usham a en outre souligné que les Maldives avaient élaboré un plan national de réponse au terrorisme et adopté un plan d'action national sur la prévention et la lutte contre l'extrémisme violent. Un centre national de réintégration a été créé et le Gouvernement s'est engagé à rapatrier et réintégrer les ressortissants maldiviens venus de zones de conflit, a ajouté le chef de délégation.

M. Usham a d’autre part souligné que son Gouvernement ne tolérait aucune forme de discours de haine ou d'incitation à la violence à l'encontre des organisations de la société civile ou des personnes qui leur sont affiliées. Le discours de haine a été érigé en infraction par le Code pénal ; tout signalement de menace ou de harcèlement fait l'objet d'une enquête approfondie de la part des forces de l'ordre, a-t-il précisé.

Le Gouvernement maldivien prévoit par ailleurs de promulguer des lois sur la liberté de la presse et la liberté d'expression, qui seront formulées dans le cadre d'un processus consultatif, a indiqué M. Usham.

M. Usham a enfin précisé que l'islam étant un élément essentiel de l'identité maldivienne, les Maldives s'engageaient à s'acquitter des obligations en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme auxquels elles sont parties d'une manière qui ne soit pas en contradiction avec la Constitution du pays.

Questions et observations des membres du Comité

M. JOSE MANUEL SANTOS PAIS, membre du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport des Maldives, a d’abord félicité le pays pour l’adoption d’un ensemble impressionnant de nouvelles lois pendant la période couverte par le rapport [2012-2022]. L’expert a demandé quel texte prévalait aux Maldives en cas de conflit entre la charia et le Pacte, et a souhaité savoir si les Maldives envisageaient de revoir leur position s’agissant de la réserve à l’article 18 du Pacte, relatif à la liberté de pensée, de conscience et de religion.

L’expert a par ailleurs rappelé une observation de la Commission des droits de l'homme des Maldives selon laquelle « le public n'est pas suffisamment sensibilisé au Pacte, les institutions de l'État et les associations privées n'en faisant pas la promotion ».

M. Santos Pais a ensuite fait état d’allégations selon lesquelles, dans les médias audiovisuels, l'égalité des chances pour tous les candidats aux dernières élections avait fait défaut, les médias d'État ayant été accusés de partialité à l'égard de l'administration en place.

L’expert a d’autre part fait remarquer que pour être nommé, un juge devait être musulman sunnite. Il a voulu savoir comment était garantie l’indépendance de la Commission de la magistrature, en particulier s’il était envisagé d’y empêcher les nominations politiques, comme l'a proposé la Cour suprême dans sa feuille de route pour la réforme judiciaire.

M. Santos Pais a noté avec satisfaction la promulgation en 2019 de la loi sur la justice pour mineurs et de la loi sur la protection des droits de l'enfant, mais a estimé que l’intention du Gouvernement d'abaisser l'âge de la responsabilité pénale à 12 ans entraînerait un grave recul dans la protection des enfants.

MME MARCIA V. J. KRAN, membre du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport des Maldives, a fait état d’inquiétudes relatives à l'indépendance de la Commission des droits de l’homme des Maldives, en raison de la présélection, par le cabinet du Président, des candidats aux postes de commissaires, qui sont ensuite nommés par le Meijlis (Parlement). Les personnes qui fournissent des informations à la Commission, notamment les journalistes et les militants des droits de l'homme, feraient l'objet de menaces et d'intimidations de la part des forces de l'ordre, du public et des extrémistes religieux, a d’autre part relevé Mme Kran. Elle a demandé comment l’État garantirait la diversité au sein de la Commission alors que la loi exige que ses membres soient musulmans.

Mme Kran a ensuite relevé que la corruption restait un problème aux Maldives, qui sont classées au 93ème rang sur 180 dans l'indice de perception de la corruption de Transparency International pour l’année 2023. Elle s’est enquise des efforts déployés pour prévenir la corruption dans l'industrie du tourisme – un secteur qui représente environ 30% du PIB de l’État.

Mme Kran a ensuite indiqué que le Comité était très troublé par la prévalence des avortements pratiqués dans des conditions dangereuses aux Maldives et par la stigmatisation qui entoure les soins génésiques. Le Comité est également préoccupé par le fait que certains praticiens refusent de pratiquer des avortements même dans les circonstances autorisées, soit notamment, dans les 120 premiers jours de grossesse, en cas d’abus sexuel, d’inceste et d’anomalie fœtale importante.

Mme Kran a regretté que seules vingt-cinq affaires aient fait l'objet de poursuites entre 2014 et 2022 en vertu de la loi relative à la lutte contre la traite des êtres humains aux Maldives. Elle a demandé comment l'État luttait contre le tourisme sexuel, y compris le tourisme sexuel impliquant des enfants.

Plusieurs questions de l’experte ont porté sur la manière dont les droits des travailleurs migrants sont garantis aux Maldives, y compris s’agissant de la liberté de religion – alors qu’il leur est désormais interdit d'introduire des textes religieux et des objets de culte dans le pays, a relevé Mme Kran.

Mme Kran a par ailleurs fait part de la préoccupation du Comité devant des arrestations arbitraires de manifestants et un usage excessif de la force par la police, en particulier lors d'un rassemblement en mars 2023, où des pistolets Taser ont été utilisés contre les personnes qui protestaient contre la corruption et la mauvaise gestion du Gouvernement.

M. BACRE WALY NDIAYE, membre du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport des Maldives, a posé plusieurs questions sur les modalités de l’état d’urgence décrété par le Gouvernement maldivien pour faire à la pandémie de COVID-19, et a en particulier souhaité savoir si des mesures avaient été prises pour que l’état d’urgence ne permette pas de déroger aux dispositions non-dérogeables du Pacte, en particulier en ce qui concerne l’interdiction de la détention arbitraire.

M. Ndiaye a ensuite fait remarquer que la nouvelle loi maldivienne contre le terrorisme définissait toujours les actes terroristes en des termes susceptibles d’interprétation très large, tels que « préjudice grave causé à autrui » ou « atteinte à la santé et à la sécurité publiques ». Il a demandé s’il était envisagé d'inviter un expert des Nations Unies pour aider le Gouvernement à réviser la loi afin de s’assurer de ne pas tomber dans les excès reprochés au gouvernement précédent.

M. Ndiaye a par ailleurs voulu savoir si le plan de lutte contre les changements climatiques avait fait l'objet de consultations avec la population et ce qui était fait pour que l’industrie touristique assure des emplois verts, en particulier pour les femmes et les jeunes, et n’utilise que des énergies renouvelables.

L’expert a aussi demandé si le témoignage d'une femme était égal à celui d'un homme dans les cas de violences sexuelles ou de viol.

MME KOBAUYAH TCHAMDJA KPATCHA, membre du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport des Maldives, a relevé qu’il existerait un niveau élevé de discrimination, de stigmatisation et de marginalisation à l’encontre des personnes LGBTI aux Maldives, y compris la criminalisation des relations homosexuelles. Elle a prié la délégation de dire ce qui était advenu de la recommandation antérieure du Comité sur la dépénalisation des relations sexuelles entre adultes consentants du même sexe.

Mme Tchamdja Kpatcha a par ailleurs voulu savoir quels crimes étaient passibles de la peine de mort aux Maldives et s’il était vrai que des personnes souffrant de handicaps mentaux ou intellectuels seraient sous le coup d’une condamnation à mort sans avoir subi d’examen psychologique indépendant. Plusieurs femmes auraient été condamnées à mort pour adultère, a également regretté l’experte.

Mme Tchamdja Kpatcha a par la suite demandé s’il ne serait pas opportun pour les Maldives d’abroger l’interdiction faite aux non-musulmans de devenir des citoyens maldiviens.

L’experte a d’autre part constaté que la loi de 2022 sur les preuves, apparemment controversée, pourrait violer la Constitution maldivienne en donnant aux tribunaux le pouvoir d'obliger les journalistes à révéler leurs sources. Selon certaines informations, a-t-elle ajouté, une grande partie du financement des médias proviendrait d'entreprises d'État et serait souvent soumis à la condition que les médias ainsi financés ne publient pas d'articles dépeignant l'entreprise ou l'État sous un jour négatif.

M. HERNAN QUEZADA CABRERA, membre du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport des Maldives, a fait état d’une baisse importante de la représentation des femmes dans le Parlement actuel et dans les ministères du Gouvernement. Il s’est demandé dans quelle mesure la volonté du Gouvernement de donner aux femmes l'exercice de leurs droits sur un pied d'égalité avec les hommes « dans tous les aspects qui ne sont pas contraires à la charia » était compatible avec le Pacte.

L’expert a par ailleurs constaté que la violence domestique n’était pas érigée en infraction pénale dans la loi sur la prévention de la violence domestique. Il a ensuite demandé s'il était envisagé de modifier le Code pénal et la loi sur les infractions sexuelles afin de dépénaliser l'adultère et les relations extraconjugales.

M. Quezada Cabrera a aussi voulu savoir s'il était prévu de modifier la loi sur les infractions sexuelles afin d'alléger, pour les crimes de violence sexuelle contre les femmes, la charge de la preuve – qu’il a jugée excessive et qui rend souvent difficile l'obtention de condamnations : en effet, au moins cinq types de preuves sont exigées pour prouver un viol ou une agression sexuelle, a-t-il relevé.

M. Quezada Cabrera a en outre fait observer que, selon la Commission des droits de l'homme des Maldives, il y a eu ces dernières années une augmentation des cas de torture commis par la police, mais très peu de poursuites par le parquet.

L’expert a d’autre part demandé si, dans un contexte où les Maldives ne disposent pas d'un système d'asile ni de mécanismes de reconnaissance et de protection des réfugiés, il existait une procédure pour traiter les demandes d'asile et de statut de réfugié.

Un autre expert du Comité a demandé si les personnes condamnées à mort à tort avaient droit à une indemnisation, comme le prévoit l’article 14 du Pacte.

Des questions des experts ont en outre porté sur les conditions de détention aux Maldives, la surpopulation carcérale étant mentionnée à plusieurs reprises.

Réponses de la délégation

La délégation a d’abord fait état de la création en 2020 du mécanisme national chargé de rédiger les rapports dus aux organes de traités et autres mécanismes des droits de l’homme et de surveiller l’ application des recommandations de ces instances. À la demande d’un expert, la délégation a ensuite donné des explications au sujet de communications (plaintes individuelles) concernant son pays dont le Comité est actuellement saisi.

La délégation a précisé que les Maldives n’avaient pas l’intention de revoir la réserve que le pays a émise à l’égard de l’article 18 du Pacte, la religion d’État aux Maldives étant l’islam.

Les droits couverts par le Pacte sont protégés par le droit national, a déclaré la délégation. En cas de conflit entre le droit national et la charia, le droit islamique prévaudrait, a-t-elle précisé. Plusieurs jugements des tribunaux maldiviens citent le Pacte, a-t-elle ajouté. La délégation a mentionné quarante-quatre programmes de formation initiale et continue des magistrats aux dispositions du Pacte et des principes qu’il défend en matière de justice et de droits de l’homme.

Le Gouvernement entend amender l’article de loi qui oblige les membres de l’ institution nationale de droits de l’homme à être musulmans, a indiqué la délégation. L’institution a vu son budget augmenter en 2021, mais celui-ci reste inférieur aux demandes de l’institution, a ajouté la délégation, expliquant que la situation financière du pays ne permet pas encore d’accroître ce budget.

Le Bureau des droits civils, qui a aussi pour mandat de coordonner les politiques publiques dans ce domaine, peut recevoir des plaintes pour violations des droits civils et politiques – toute comme la Commission des droits de l’homme des Maldives –, mais il ne peut mener d’enquête, a précisé la délégation.

Transparence et reddition de comptes sont des priorités pour le Gouvernement, a poursuivi la délégation en réponse à des questions sur la lutte contre la corruption aux Maldives. Le Président maldivien a ouvert une ligne directe permettant aux citoyens de lui faire part de leurs doléances, a en outre indiqué la délégation ; il a également créé une académie anticorruption chargée de sensibiliser le grand public et de former les fonctionnaires chargés d’évaluer les appels d’offre, a-t-elle ajouté. Les ministres doivent déclarer leurs actifs chaque année, a-t-elle par ailleurs souligné, avant d’indiquer que la commission des affaires judiciaires est habilitée à enquêter sur les agissements des fonctionnaires.

La loi sur l’état d’urgence adoptée pendant la pandémie de COVID-19 a été abrogée en 2022, a d’autre part rappelé la délégation. Elle a ajouté que le Gouvernement avait vacciné gratuitement toute la population maldivienne, y compris les étrangers.

Les Maldives ont lancé une invitation permanente à tous les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales des Nations Unies, a également fait valoir la délégation, avant de rappeler que la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste s’était rendue en visite aux Maldives en 2022 et que ses recommandations avaient été prises en compte dans la rédaction de la loi portant sur cette question.

Les exigences et critères en matière d’acquisition de la nationalité maldivienne n’ont pas changé ces dernières années, l’islam étant un pilier de l’identité nationale, a indiqué la délégation.

Toute disposition légale qui serait contraire à l’islam serait inconstitutionnelle, a d’autre part affirmé la délégation en réponse à une question sur la dépénalisation des relations homosexuelles. Dans le même temps, a-t-elle assuré, le cadre et la pratique législatifs ne sont pas discriminatoires et garantissent des droits égaux à toutes et à tous.

Le droit de la famille est en cours de réforme, y compris s’agissant de la lutte contre la violence domestique, qui sera érigée en infraction pénale à part entière, au même titre que les mutilations génitales féminines, a poursuivi la délégation. Le Gouvernement est pleinement attaché à mener cette réforme, a-t-elle insisté. La prochaine phase de la réforme du droit de la famille consistera dans un processus de consultation impliquant aussi la société civile, a-t-elle par la suite précisé.

Plusieurs questions des experts du Comité ayant porté sur la ruqya et les risques de violence envers les femmes qu’elle entraîne, la délégation a précisé que cette pratique médicale traditionnelle, si elle cause des effets délétères pour les femmes, donnait lieu à des poursuites pénales.

Les femmes représentant seulement un peu plus de 3% des parlementaires , le Gouvernement applique une stratégie et un plan d’action pour aider les femmes à acquérir des compétences de leadership et à occuper des postes à responsabilité, a en outre indiqué la délégation.

Il n’est pas nécessaire de réunir tous les cinq éléments de preuve prévus par la loi pour incriminer un suspect de violence sexuelle, a assuré la délégation, affirmant que la loi est souvent mal interprétée.

Les autorités mettent à disposition des services d’interruption volontaire de grossesse et font la promotion de la santé procréative, a d’autre part déclaré la délégation.

Les condamnations à la peine de mort sont prononcées dans le respect des garanties juridiques des prévenus et uniquement pour les crimes les plus graves, tel que l’homicide volontaire, a ensuite souligné la délégation. L’état psychologique du prévenu est évalué avant même la tenue du procès, a-t-elle indiqué.

La peine de mort n’est plus appliquée depuis 1964 aux Maldives, et seize personnes sont en attente d’exécution, a précisé la délégation. Les Maldives ne peuvent ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, relatif à la peine de mort, a affirmé la délégation.

La peine de mort est prévue par la loi islamique et le pardon présidentiel est possible pour les crimes autres que les assassinats, a par la suite ajouté la délégation.

La délégation a décrit les mesures prises par le Gouvernement maldivien pour renforcer la résistance du pays face aux changements climatiques et à la dégradation de l’environnement, citant notamment la plantation de nombreux arbres, la défense de la pêche durable et la lutte contre la pêche illégale. Le Gouvernement forme en outre des techniciens pour favoriser le recours aux énergies durables dans le secteur du tourisme.

L’actuel Plan d’action contre la traite des personnes court jusqu’en 2026 et les autorités ont pour objectif de proposer des programmes de réintégration exhaustifs en faveur des migrants victimes de la traite, a indiqué la délégation.

Le Gouvernement entend que les personnes placées en garde à vue ou en détention puissent signaler toute allégation de mauvais traitement ou de torture, a poursuivi la délégation. Concernant les conditions de détention, en particulier eu égard à la surpopulation carcérale, les autorités ont pour projet de généraliser les peines alternatives à la privation de liberté et d’ouvrir des prisons plus petites au sein des communautés, a indiqué la délégation.

Toute discrimination en matière d’emploi et de salaire est interdite par la loi, y compris pour des motifs liés à l’origine ethnique ou au handicap, a-t-il en outre été précisé.

Le Ministère du travail s’efforce actuellement de régulariser de nombreux migrants, a ajouté la délégation.

Il n’existe pas de réglementation ou de procédure administrative en matière d’asile, tout se réglant au cas par cas par le truchement des différentes autorités concernées, a fait savoir la délégation. Les Maldives reçoivent l’aide du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) afin de prendre en charge les personnes en transit sur leur territoire. Les ressources étant très limitées, ces personnes sont encouragées à se rendre dans des pays tiers. Le Gouvernement respecte le principe de non-refoulement, a assuré la délégation.

Les victimes de violence sexuelle et de violence domestique peuvent bénéficier d’une aide juridique gratuite, a d’autre part indiqué la délégation. Le Gouvernement va mener des consultations en vue de la préparation d’un projet de loi visant à garantir l’accès à cette aide dans les procédures tant civiles que pénales, a-t-elle ajouté.

La délégation a ensuite mentionné plusieurs mesures prises pour améliorer le fonctionnement et l’indépendance de la justice, y compris par l’introduction d’un outil électronique de gestion administrative des procédures, par le comblement des retards accumulés en matière pénale, et par la mise en place d’un système d’audience par vidéo, entre autres. Les juges reçoivent tous, à l’Académie judiciaire, des formations consacrées aux droits de l’homme, a fait valoir la délégation. Elle a mentionné d’autres efforts destinés à élever le niveau de formation des magistrats afin d’améliorer la confiance du public envers le pouvoir judiciaire.

Le Gouvernement prendra des mesures pour assurer le financement des médias, a fait savoir la délégation. Il est déjà engagé à assurer la sécurité des journalistes et des militants de la société civile ciblés par des menaces (y compris de mort) – lesquelles sont passibles de sanction, a rappelé la délégation.

La loi en vigueur protège déjà les journalistes contre la publication de leurs sources, sauf dans certaines affaires relevant de la sécurité nationale et de la lutte antiterroriste, a d’autre part indiqué la délégation.

Le Gouvernement permet l’exercice de la liberté de manifester, a par ailleurs assuré la délégation, avant d’ajouter que la police est habilitée à agir pour garantir la sécurité des personnes, le recours à la force étant alors une mesure de dernier recours et la Commission nationale des droits de l’homme pouvant ouvrir une enquête en cas de manquement à ce principe.

En 2023, de nouveaux juges et magistrats ont été formés aux spécificités de la justice pour mineurs, a d’autre part souligné la délégation. De nombreux enfants de 12 à 14 étant tombés dans les griffes de groupes terroristes, le Gouvernement s’efforce de prévenir ce recrutement et d’en réinsérer les victimes dans un centre situé sur une île, a-t-elle indiqué.

Remarques de conclusion

M. SANTOS PAIS a constaté des lacunes dans le système judiciaire et dans la protection des droits de l’enfant aux Maldives, et a par ailleurs dit craindre l’utilisation de la religion comme prétexte ou obstacle à certaines réformes. Il a recommandé que les autorités prennent du recul sur la place qu’occupe la religion aux Maldives et s’efforcent de mettre les droits de l’homme au cœur de leurs priorités.

M. USHAM a déclaré pour sa part que l’échange avec le Comité avait permis aux Maldives de comprendre les limites qu’impose la présence très marquée de l’islam dans la législation du pays. Les Maldives n’en restent pas moins attachées à la protection des droits civils et politiques, ce dont témoignent les dispositions constitutionnelles en vigueur et les mesures prises par le Gouvernement pour obtenir de grandes percées législatives conformément au Pacte, a insisté le Procureur général.

 

 

 

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