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Examen de la Bolivie devant le CERD: les questions relatives aux peuples autochtones, aux Afro-boliviens et aux migrants sont au cœur du dialogue
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) a examiné, hier après-midi et cet après-midi, le rapport présenté par l’État plurinational de Bolivie au titre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale . Pendant cet examen, un expert membre du Comité a relevé que la société bolivienne avait connu d’importantes transformations sociales propices à la participation des communautés défavorisées dans la vie publique, et que des mesures importantes avaient été prises pour protéger les droits des peuples autochtones, des Afro-boliviens et des autres catégories de population protégées par la Convention.
L’expert a cependant relevé que la discrimination héritée était identifiée comme un défi structurel en Bolivie. Il a ainsi évoqué des violences policières contre les Afro-boliviens et le problème concomitant du profilage racial. L’expert a demandé si des mesures avaient été prises pour remédier au racisme et à la discrimination raciale au sein des forces armées - dont, a-t-il relevé, les comportements discriminatoires font régulièrement l’objet de plaintes. L’expert a affirmé que les allégations de discrimination au sein des force de défense et de sécurité boliviennes avaient été l’une des causes des événements de 2019.
Un autre expert a fait part de la préoccupation du Comité devant les rapports émanant de diverses sources qui font état de violences racistes pendant la crise de 2019- 2020, notamment d'agressions, de menaces et de mauvais traitements infligés à des femmes autochtones par des groupes organisés. L’expert a aussi fait état de discriminations multiples et intersectorielles dont sont victimes les femmes autochtones et afro-boliviennes. Il a demandé quelles mesures concrètes avaient été prises pour prévenir la diffusion de stéréotypes et de préjugés raciaux, en particulier contre les peuples autochtones et afro-boliviens.
Plusieurs questions des experts du Comité ont porté sur l’accès à la justice pour les Afro-boliviens et les autochtones et sur la question du consentement préalable libre et éclairé des peuples autochtones concernant les projets qui les concernent.
L’attention des experts s’est également portée sur la situation des migrants, en particulier vénézuéliens, en Bolivie. Un expert a fait remarquer que, selon des informations reçues par le Comité, les personnes d’origines péruvienne, colombienne, vénézuélienne et haïtienne sont particulièrement exposées à la discrimination et à la xénophobie.
Les cas signalés de racisme dans le sport sont nombreux en Bolivie, a-t-il en outre été relevé.
Présentant le rapport de son pays, Mme Sabina Orellana Cruz, Ministre des cultures, de la décolonisation et de la dépatriarcalisation de l’État plurinational de Bolivie, a précisé qu’en tant que pays plurinational, la Bolivie comprenait parfaitement les défis et les blessures que la discrimination et le racisme peuvent causer au peuple. Son histoire enseigne de précieuses leçons sur l'importance de l'inclusion, du respect et de l'appréciation de la diversité, et le Gouvernement reconnaît que le racisme empêche le développement intégral des individus, ainsi que le progrès des nations et qu’il sape les principes mêmes de la paix et de la justice sociale.
La lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination a toujours fait partie du processus de changement que l'État bolivien a entrepris dans sa révolution démocratique et culturelle, dans le cadre de la décolonisation et de la dépatriarcalisation, a poursuivi la Ministre. C’est pourquoi, le 8 octobre 2010, a été promulguée la Loi n°045 relative à la lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination, pour rendre effectifs les droits à l'égalité et à la non-discrimination, l’un des objectifs de cette Loi étant l'élimination des comportements racistes et de toutes les formes de discrimination.
Mme Orellana Cruz a rappelé qu’en 2019 et 2020, la Bolivie avait connu un coup d'État au cours duquel des événements violents se sont produits, avec des composantes importantes de discrimination, d'intolérance et de violence raciale sélective à l’encontre les femmes, des peuples et des communautés autochtones. Avec le retour à la démocratie en 2020, le Ministère des cultures, de la décolonisation et de la dépatriarcalisation a été créé : parmi ses premières tâches, a souligné la Ministre, figuraient la mise en œuvre et l'application de tous les engagements et mandats juridiques nationaux et internationaux, notamment la politique publique de prévention et de lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination.
Outre Mme Orellana Cruz, la délégation bolivienne était composée de Mme Maira Mariela Macdonal Alvarez, Représentante permanente de l’État plurinational de Bolivie auprès des Nations Unies à Genève, et de plusieurs représentants des Ministères de la justice et de la transparence institutionnelle, du développement productif et de l’économie plurielle, de l’éducation, de la santé et des sports, et du développement rural et des terres.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Bolivie et les publiera à l’issue de sa session, le 8 décembre.
Demain matin, à 10 heures, le Comité achèvera l’examen du rapport du Maroc, entamé ce matin.
Examen du rapport de l’État plurinational de Bolivie
Le Comité est saisi du rapport valant vingt-et-unième à vingt-sixième rapports périodiques de la Bolivie (CERD/C/BOL/21-26).
Présentation du rapport
Présentant le rapport de son pays, MME SABINA ORELLANA CRUZ, Ministre des cultures, de la décolonisation et de la dépatriarcalisation de l’État plurinational de Bolivie , a d’abord exprimé la solidarité de son pays avec la Palestine « face à l'agression et au génocide » qu'Israël commet contre le peuple palestinien. La Bolivie rejette toute guerre, tout colonialisme, toute exploitation et tout châtiment collectif, et rien ne justifie le meurtre de civils, d'enfants, de femmes, de personnes âgées, non plus que les violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire, a insisté Mme Orellana Cruz.
La Ministre a ensuite indiqué que son pays avait entamé, depuis 2006, un processus pour se transformer en un État plurinational inclusif, décolonisé, dépatriarcalisé et socialement juste, fondé sur le respect et l'égalité pour tous, avec des principes de complémentarité et d'équité dans la distribution et la redistribution des richesses. La Constitution politique de l'État (CPE) approuvée en 2009 postule la philosophie du Bien Vivre (Vivir Bien), a ajouté Mme Orellana Cruz. L’État bolivien repose sur la reconnaissance de la préexistence des peuples et nations premiers autochtones, ce qui conduit à la reconnaissance de leur droit à l'autodétermination, a-t-elle en outre souligné.
L’État combine les valeurs culturelles des peuples et des nations autochtones et les principes libéraux, a poursuivi Mme Orellana Cruz. Ses langues officielles sont l'espagnol et les langues autochtones de toutes les régions de Bolivie, soit 36 langues, dont l'aymara, le quechua et le guarani, a-t-elle précisé. Le caractère plurinational de l’État est lié à l'axe décolonisateur en tant que feuille de route pour se départir de l'État républicain, colonial et libéral, en référence à la reconnaissance de la préexistence des nations premières autochtones. L’État plurinational s'acquitte aussi d'une dette historique envers les héritiers des peuples ancestraux, en leur redistribuant leurs territoires, a indiqué la Ministre.
En tant que pays plurinational, la Bolivie comprend parfaitement les défis et les blessures que la discrimination et le racisme peuvent causer au peuple. Son histoire enseigne de précieuses leçons sur l'importance de l'inclusion, du respect et de l'appréciation de la diversité. Le Gouvernement reconnaît que le racisme empêche le développement intégral des individus, ainsi que le progrès des nations et qu’il sape les principes mêmes de la paix et de la justice sociale.
La lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination a toujours fait partie du processus de changement que l'État bolivien a entrepris dans sa révolution démocratique et culturelle, dans le cadre de la décolonisation et de la dépatriarcalisation. C’est pourquoi, le 8 octobre 2010, a été promulguée la Loi n°045 relative à la lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination, pour rendre effectifs les droits à l'égalité et à la non-discrimination, a indiqué la Ministre. L’un des objectifs de ladite Loi est l'élimination des comportements racistes et de toutes les formes de discrimination, ainsi que la consolidation des politiques publiques de protection et de prévention des crimes racistes et de toutes les formes de discrimination, a-t-elle précisé.
Mme Orellana Cruz a rappelé qu’en 2019 et 2020, la Bolivie avait connu un coup d'État au cours duquel des événements violents se sont produits, avec des composantes importantes de discrimination, d'intolérance et de violence raciale sélective à l’encontre les femmes, des peuples et des communautés autochtones, de même que des attaques contre les symboles de l'identité autochtone, tels que le wiphala et les vêtements autochtones, ainsi que la suppression du Ministère des cultures et du tourisme. Les expressions les plus violentes ont été les massacres de Sacaba et Senkata, outre de nombreux autres actes de violence politique dans d'autres régions du pays, qui ont fait l'objet d'enquêtes du Groupe international d'experts indépendants (GIEI) en vertu d'un accord entre l'État bolivien et la Commission interaméricaine des droits de l'homme.
Avec le retour à la démocratie en novembre 2020, le Ministère des cultures, de la décolonisation et de la dépatriarcalisation a été créé, a souligné la Ministre. Parmi ses premières tâches, a-t-elle précisé, figuraient la mise en œuvre et l'application de tous les engagements et mandats juridiques nationaux et internationaux, notamment la politique publique de prévention et de lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination. Mme Orellana Cruz a regretté que l'oligarchie bolivienne ne comprenne pas ce processus de transformation et de consolidation de l'État plurinational de Bolivie, et qu’elle mène des actions négatives telles que la grève de 36 jours dans le département de Santa Cruz, ce qui nuit au développement et à la croissance intégrale du pays.
La Bolivie est fermement engagée à éradiquer le patriarcat et le colonialisme, qui se traduisent par le fléau du racisme et des discriminations, a insisté Mme Orellana Cruz.
Questions et observations des membres du Comité
M. BAKARI SIDIKI DIABY, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’État plurinational de Bolivie , a relevé que si la société bolivienne a connu d’importantes transformations sociales propices à la participation des communautés défavorisées dans la vie publique, la discrimination héritée y est identifiée comme un défi structurel.
L’expert a demandé comment l’État pourrait faire en sorte que le recensement reflète mieux la réalité démographique du pays. Il a fait observer que le Gouvernement ne produit ni ne publie de données statistiques actualisées sur les demandeurs d’asile et les réfugiés vivant dans le pays, ni sur les Vénézuéliens résidant en Bolivie, ni sur les Vénézuéliens qui ont réussi à régulariser leur statut.
S’agissant du cadre juridique et institutionnel contre la discrimination raciale, M. Diaby a voulu savoir si l’État mettrait la législation nationale en conformité avec les normes internationales en matière de droits de l'homme et s’il avait envisagé de ratifier la Convention interaméricaine contre le racisme, la discrimination raciale et les formes connexes d'intolérance.
M. Diaby a ensuite demandé si des séances de sensibilisation concernant la procédure de communication (plainte individuelle) prévue à l'article 14 de la Convention étaient organisées à l'intention de la société civile et du grand public, et a voulu savoir quelles mesures concrètes étaient prises pour sensibiliser la population à ses droits et aux mécanismes de plainte, ainsi qu'aux recours judiciaires et non judiciaires dont elle dispose dans le cadre de la Loi 045/2010, mentionnée par Mme Orellana Cruz.
M. Diaby a aussi demandé des données statistiques actualisées sur le nombre et la nature des crimes de haine et d'incitation à la discrimination raciale, ainsi que sur le nombre de condamnations et les peines prononcées dans ce contexte. Le Comité souhaite également connaître les mesures prises par l'État pour intégrer dans la législation l'interdiction des organisations et des activités de propagande incitant à la haine raciale, conformément à l'article 4 de la Convention, a en outre souligné l’expert.
M. Diaby a par ailleurs fait état d’informations selon lesquelles les sous-officiers de l’armée bolivienne, en majorité des Aymará et des Quechua, n'ont aucune possibilité de promotion au-delà du grade de sergent, ni accès aux instituts de formation des officiers, lesquels sont généralement blancs ou métis.
M. Diaby a aussi évoqué les violences policières contre les Afro-boliviens et le problème concomitant du profilage racial.
L’expert a par la suite demandé si des mesures avaient été prises pour remédier au racisme et à la discrimination raciale au sein des forces armées - dont, a-t-il relevé, les comportements discriminatoires font régulièrement l’objet de plaintes.
M. Diaby a également demandé des informations détaillées sur les mesures prises par la Bolivie en vue d’adopter dans les plus brefs délais une loi-cadre pour les consultations avec les nations et les peuples autochtones afin qu'ils puissent décider d'accorder ou non leur consentement préalable libre et éclairé. De même, il a voulu savoir quel dispositif était adopté pour appliquer effectivement l'article 115 de la loi relative aux hydrocarbures, qui propose de mener des consultations de bonne foi, selon les principes de sincérité, de transparence, d'information et de respect des délais, conformément à la Convention n°169 de l’Organisation internationale du Travail, relative aux peuples indigènes et tribaux.
Faisant par ailleurs état d’une discrimination multiple dont sont victimes les Afro-Boliviens, l’expert s’est enquis des mesures prises par l’État pour lutter contre cette discrimination. Il a recommandé à l’État d'étendre la couverture de l’éducation interculturelle et plurilingue à tous les niveaux et sous-systèmes de l'éducation, en allouant des ressources financières suffisantes et en formant des ressources humaines, et de faire en sorte que tous les autochtones et les Afro-Boliviens, y compris ceux qui vivent dans des zones rurales ou difficiles d'accès, disposent d'une carte d'identité.
L’expert s’est aussi interrogé sur le résultat des mesures prises pour combattre les discriminations multiples et intersectorielles dont sont victimes les femmes autochtones et afro-boliviennes.
M. Diaby a fait remarquer que les allégations de discrimination au sein des force de défense et de sécurité boliviennes avaient été l’une des causes des événements de 2019. Il a demandé ce qu’il en était des enquêtes sur ces allégations.
D’autres questions de M. Diaby ont porté sur l’accès à l’éducation pour les enfants autochtones et sur les effets de certains projets industriels sur leur santé.
M. IBRAHIMA GUISSÉ, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport bolivien , a demandé ce qui était fait pour améliorer l’accès à la justice pour les Afro-boliviens, les autochtones et les femmes. Il s’est interrogé sur le nombre de plaintes pour racisme et discrimination raciale enregistrées et jugées, et sur les réparations accordées le cas échéant, et a voulu savoir combien de femmes autochtones ont eu accès au système judiciaire par l’intermédiaire d’interprètes.
Le Comité, a poursuivi M. Guissé, est préoccupé par les rapports émanant de diverses sources – telles que la Commission interaméricaine des droits de l'homme, le bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en Bolivie, les observations finales du Comité des droits de l'homme et même du Comité contre la torture – qui font état de violences racistes pendant la crise de 2019- 2020, notamment d'agressions, de menaces et de mauvais traitements infligés à des femmes autochtones par des groupes organisés.
L’expert a demandé des précisions sur la création d’espaces de consensus et de dialogue, et sur les mesures prises pour consolider encore la pluralité et l’interculturalité prévues par le Plan multisectoriel de lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination 2016-2020. M. Guissé a également voulu savoir quelles mesures concrètes avaient été prises pour prévenir la diffusion de stéréotypes et de préjugés raciaux, en particulier contre les peuples autochtones et afro-boliviens. Les cas signalés de racisme dans le sport sont nombreux en Bolivie, a en outre relevé l’expert.
M. Guissé a rappelé que, dans leurs précédentes observations, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels et le CERD lui-même avaient fait part de leurs préoccupations au sujet des menaces et atteintes à l’intégrité physique des défenseurs des droits de l’homme en Bolivie, en particulier ceux qui s’emploient à défendre les peuples autochtones.
Le même expert a indiqué que, selon des informations reçues par le Comité, les personnes d’origines péruvienne, colombienne, vénézuélienne et haïtienne sont particulièrement exposées à la discrimination et à la xénophobie. Il s’est enquis des mesures prises pour prévenir, poursuivre et punir les cas de violence et de harcèlement commis par les forces de l'ordre à l'encontre des migrants.
M. Guissé a aussi fait remarquer que le Gouvernement n'avait pas encore mis en œuvre de mécanismes pour prévenir le risque d'apatridie pour les enfants boliviens nés de migrants sans papiers – en particulier en provenance du Venezuela.
M. GUN KUT, rapporteur chargé du suivi des recommandations du Comité , a rappelé qu’à l’issue du précédent examen de la Bolivie, en mars 2011, le Comité avait recommandé, dans ses observations finales, qu’aucun réfugié ne soit expulsé de force vers un pays où cette personne serait exposée à des violations de ses droits fondamentaux. Le Comité avait aussi demandé des informations complémentaires sur les mesures prises à la suite d’actes de violences commis contre des peuples autochtones, contre des paysans et contre des migrants, a-t-il également rappelé.
Une autre experte membre du Comité a demandé comment l’État, qui ne collecte pas de données statistiques ventilées par appartenance ethnique, pouvait prendre les mesures correctives nécessaires en cas de discrimination raciale.
Des questions des experts ont aussi porté sur l’articulation entre la justice ordinaire et la justice des peuples premiers autochtones.
Une experte a constaté un déficit de participation à la vie publique de la part des peuples autochtones en Bolivie. Elle a en outre attiré l’attention sur la vulnérabilité des peuples premiers autochtones touchés par l’exploitation minière.
Réponses de la délégation
Le Gouvernement prend la question du recensement au sérieux, et il entend obtenir des informations aussi précises que possible sur la composition de la population, a assuré la délégation.
Le tribunal constitutionnel a mis sur un pied d’égalité la justice ordinaire et la justice des peuples premiers autochtones, a précisé la délégation. Toute une jurisprudence vient appuyer le fonctionnement efficace de cette dernière, a-t-elle ajouté.
La Constitution reconnaît les peuples autochtones et les Afro-boliviens en tant que partie intégrante de la nation, a souligné la délégation. Elle a indiqué que 18 000 hectares de terres avaient été concédés à 39 communautés afro-boliviennes. Le peuple autochtone Yacuma, mentionné par un expert du Comité, s’est vu octroyer plusieurs dizaines de milliers d’hectares de terres ancestrales, a précisé la délégation.
La Constitution prévoit aussi que les peuples autochtones premiers paysans doivent donner leur consentement libre et éclairé aux projets d’infrastructures ou miniers réalisés sur leurs terres, a ajouté la délégation.
Un expert ayant évoqué la forte incidence de grossesses parmi les adolescentes autochtones en Bolivie, la délégation a assuré que le Gouvernement avait pris des mesures pour juguler ce phénomène.
Les peuples autochtones bénéficient aussi de mesures prises par l’État pour mieux répartir la richesse nationale, a d’autre part indiqué la délégation. En outre, l’État applique des quotas de sièges réservés aux autochtones au sein des organes politiques élus, ce qui a permis, notamment, de renforcer la participation des femmes à la vie politique.
La délégation a mentionné d’autres mesures prises par son Gouvernement en faveur de l’éducation, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales. Elle a fait état d’une forte réduction du taux de décrochage scolaire parmi les enfants autochtones depuis 2000.
Le Gouvernement a créé une Direction générale des peuples autochtones, chargée en particulier d’aider les Guarani à sortir de la situation d’exploitation dans laquelle ils vivent, a par ailleurs souligné la délégation. De plus, a-t-elle ajouté, plusieurs mesures ont été prises pour que les peuples premiers autochtones et les Afro-boliviens accèdent plus facilement à la justice, en particulier au travers d’une simplification des procédures de dépôt de plainte. D’autres mesures sont prises pour éliminer le profilage racial par la police, en particulier par la formation des personnes concernées aux dispositions de la Loi n°045 relative à la lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination.
Il a été établi que le coup d’État de 2019 a été motivé par des raisons liées, entre autres, au racisme et à la discrimination, a d’autre part affirmé la délégation. Depuis, a-t-elle ajouté, la Bolivie a accompli des progrès importants, mais le système judiciaire n’a pas encore les capacités pour rendre justice aux victimes des actes de discrimination, y compris pour ce qui est des actes de violence, commis pendant cette crise. Le Gouvernement travaille actuellement à l’adoption d’une loi sur la réparation des victimes, a indiqué la délégation.
Il n’y a pas de registre des plaintes relatives aux violences exercées spécifiquement contre la population afro-bolivienne, a précisé la délégation.
La délégation a indiqué que les promotions dans l’armée sont régies par des règles internes qui doivent être respectées.
Des questions des experts du Comité ayant porté sur le Comité national de lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination , la délégation a précisé qu’il avait été créé en 2010 et comprenait des représentants du Gouvernement et de plus de 70 organisations publiques et privées réparties sur tout le territoire national. Ledit Comité a appliqué un plan périodique multisectoriel 2012-2023 mais n’a pu accomplir toutes ses missions en raison du coup d’État de 2019, a souligné la délégation.
Le Comité national a sensibilisé plus de 10 000 fonctionnaires à la lutte contre la discrimination et a traité quelque 1038 plaintes pour racisme, dont plusieurs sont en cours de jugement devant les tribunaux compétents, a précisé la délégation.
Le Comité national est en train de préparer le prochain plan contre le racisme et la discrimination raciale, a en outre fait savoir la délégation.
La délégation a par la suite précisé que le procureur avait reçu 317 plaintes pour racisme, dont une a donné lieu à une sanction, et que 1643 plaintes avaient été déposées pour des faits de discrimination. Depuis 2022, il n’y a pas eu d’affaire impliquant un acte discriminatoire ou raciste commis par des agents de l’État au détriment de Boliviens ou de migrants, a-t-il été précisé.
La délégation a par ailleurs souligné que le pouvoir judiciaire disposait de 562 interprètes dans les langues nationales. De plus, un protocole a été diffusé dans toute la structure judiciaire pour faciliter l’ accès à la justice pour les femmes et les personnes vulnérables. Ce protocole vise à répondre en particulier aux besoins des femmes autochtones. L’État leur garantit l’accès à la justice par le biais d’unités spécialisées de la police et du parquet. Les victimes sont aidées à faire valoir leurs droits devant la justice.
Des progrès ont été réalisés dans la répression des crimes de haine , a fait savoir la délégation. Ainsi, toute personne qui commet des actes motivés par le racisme ou la discrimination raciale s’expose désormais à des sanctions pénales aggravées, a-t-elle précisé.
S’agissant de la lutte contre le racisme, le premier sommet national de lutte contre le racisme et la discrimination sous toutes ses formes a eu lieu en 2022, en présence de quelque mille organisations de la société civile concernées, a indiqué la délégation. Le processus de décolonisation et de dépatriarcalisation a été officiellement promulgué à cette occasion : toutes les entités publiques travaillent actuellement à une meilleure identification du problème pour mieux sanctionner les manquements, a-t-elle précisé.
Le Gouvernement s’efforce par ailleurs de combler les disparités entre les différentes couches de la population et de combattre la violence contre les femmes, a indiqué la délégation. De même, il s’efforce de réduire les écarts salariaux entre hommes et femmes.
La loi bolivienne prévoit le principe de non-refoulement de personnes, y compris de requérants d’asile, vers des pays où leur vie ou leurs droits seraient menacés, a assuré la délégation. L’État peut délivrer des papiers d’identité aux personnes apatrides, a-t-elle ajouté.
La délégation a également rendu compte du dispositif mis en place pour protéger les droits et l’intégrité des personnes victimes de traite des êtres humains.
Le Gouvernement a pris des mesures en faveur des jeunes vénézuéliens immigrés en Bolivie, en particulier au travers des régularisations et de la protection contre les situations de vulnérabilité, a ensuite fait valoir la délégation. Quelque 17 000 enfants et adolescents en Bolivie déclarent avoir des parents vénézuéliens et nombre d’entre eux sont scolarisés en Bolivie, où ils bénéficient aussi de soins de santé, a-t-elle indiqué.
La délégation a en outre fait état d’une forte diminution du nombre d’enfants placés dans des institutions.
Le Conseil national des provinces autonomes est chargé de coordonner l’action du Gouvernement central et des autorités régionales, a ensuite indiqué la délégation. Une de ses commissions techniques, spécialisée dans les questions liées à l’auto-identification, collaborera au recensement en 2024, a-t-elle fait savoir. La délégation a évoqué la collecte d’informations relatives aux caractéristiques culturelles et linguistiques de la population bolivienne et a souligné que le prochain recensement demandera aux répondants s’ils s’auto-identifient comme membres des peuples autochtones, Afro-boliviens ou autres.
Le Gouvernement a créé un comité chargé de contrôler le suivi des recommandations des organes de traités des Nations Unies, y compris celles émanant du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, a fait savoir la délégation.
La délégation a par ailleurs décrit les mesures sanitaires qui ont été prises en faveur des populations autochtones pendant la pandémie de COVID-19.
Remarques de conclusion
M. DIABY a relevé que, dans l’ensemble, la Bolivie avait pris des mesures importantes pour protéger les droits des peuples autochtones, des Afro-boliviens et des autres catégories de population protégées par la Convention. L’expert a cependant constaté un écart entre la Convention et son application concrète dans le pays.
MME ORELLANA CRUZ a dit avoir pris note de l’intérêt montré par la Présidente du Comité pendant le dialogue au sujet du processus de décolonisation et de dépatriarcalisation engagé en Bolivie. La Ministre a précisé que cette démarche, issue des mouvements sociaux de base, en particulier des femmes, était destinée à démanteler les structures coloniales et patriarcales en vue d’éliminer les situations de discrimination qui opèrent, en particulier, au détriment des femmes, et d’instaurer une société plus équitable, basée sur la diversité.
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